Le documentariste Sylvain Desclous a planté sa caméra à Preuilly-sur-Claise, un petit village d’Indre-et-Loire, dans l’arrondissement de Loches, pendant la campagne des élections municipales 2021. Le maire sortant ne se représentant pas, trois listes apolitiques s’y affrontent : celles de Jean-Paul qui entend mettre en oeuvre une « méthode » participative, sans s’engager sur les solutions, celle de Patrick, très (trop ?) confiant dans ses chances de victoire et enfin celle de Mathieu, un enfant du pays parti à Paris faire des études et revenu au pays, qui fait campagne avec Guy, un fort-en-gueule.
Avec l’approche des élections présidentielles, les documentaires politiques se multiplient : "Municipale", "La Disparition", "Un peuple", "Media Crash", "À demain mon amour"… Les passionnés du genre – et j’en suis – s’en féliciteront.
Comme "Municipale", "La Campagne de France" se focalise sur les élections municipales de mars 2021. Dans "Municipale", les documentaristes avaient recruté un acteur pour interpréter le rôle d’un vrai-faux candidat parachuté de Paris à Revel dans les Ardennes. Pas de tel artifice dans "La Campagne de France" au titre intelligemment polysémique : la campagne y est en même temps électorale et rurale… même si ce second aspect n’est pas autant creusé qu’il méritait de l’être. Le documentaire ne dira pas grand chose des enjeux de la ruralité ou de la dévitalisation des petites villes dans la France périphérique. Le seul sujet de fond qu’il évoque est celui de la traversée du centre-bourg par les poids lourds dont les trois candidats font la question centrale de l’élection et dont les images rythment le documentaire.
"La Campagne de France" se focalise sur la campagne électorale proprement dite qu’elle filme comme un affrontement entre trois hommes. C’est à Mathieu, dont il semble être le plus proche que Sylvain Desclous s’est le plus intéressé. Ce drôle de bonhomme, un peu lunaire, réussit l’exploit d’être chauve aux cheveux longs. Sorti de Normale sup, se disant entrepreneur-chercheur en intelligence artificielle, il surprend par sa maladresse et par son amateurisme. D’un candidat aussi « capé » on aurait attendu plus d’aisance, plus d’ambition, plus de machiavélisme.
Guy, son co-listier, réussit presqu’à lui voler la vedette. On comprend que c’est un vieux routier de la politique locale, qu’il a déjà participé à de nombreuses campagnes, mais que ses idées – il est de gauche affichée et volontiers anticlérical – et son sale caractère l’ont toujours empêché d’être élu. A-t-il vu en Mathieu une marionette qu’il manipulerait à sa guise une fois élu au poste de maire ? Ou est-ce Mathieu qui est allé solliciter son soutien pour pouvoir bénéficier de son expérience ? Le documentaire ne nous le dit pas. Mais il filme cette alliance improbable jusqu’aux résultats du premier tour, le dimanche 13 mars 2020, alors que le Covid allait placer la France sous cloche pendant de longues semaines.
Si vous voulez connaître leur résultat, allez voir "La Campagne de France" !