Le Dernier Jaguar : les secrets du tournage

Le Dernier jaguar est indirectement lié à Mia et le lion blanc et son succès un peu partout dans le monde. Gilles de Maistre confie : "Les spectateurs nous demandaient une suite. C’était inenvisageable : la relation entre la jeune fille et le lion s’était arrêtée avec la fin du tournage, et on ne pouvait pas « la reprendre ». Un Mia et le lion blanc 2, était donc exclu… Mais ça m’a fait réfléchir à une autre idée : utiliser le même attelage pour mettre en lumière cette fois la destruction de la forêt amazonienne et le très lucratif et méconnu « trafic d’animaux »."

"Un film où cette cause serait portée par une autre relation hors norme : celle entre une enfant et un jaguar. Le prédateur mythique de la forêt amazonienne, le jaguar, très méconnu, que l’on voit rarement dans les films et une toute jeune fille. Mais comme pour Mia, on devrait d’abord réussir à créer une véritable relation entre eux. C’est ainsi qu’est né Le Dernier jaguar."

Le tournage s’est déroulé en janvier 2022, puis de septembre à début décembre 2022, à Playa del Carmen au Mexique et à Montréal au Canada.

Avec Le Dernier jaguar, Gilles de Maistre évoque la destruction de la forêt amazonienne et le trafic d’animaux. Deux phénomènes qui ne datent malheureusement pas d'hier, comme il explique : "La déforestation est gigantesque, incontrôlable, et le trafic des animaux est l’un des plus importants au monde. Nos projets partent souvent d’un message qu’on souhaite faire passer. Le film dit que nous nous tirons une balle dans le pied. Mia et le lion blanc révélait l’horreur de la chasse aux lions ; Le Loup et le lion dénonçait l’utilisation des animaux pour le divertissement, comme le cirque."

"Dans Le Dernier jaguar, nous traitons du plus gros problème que l’Humanité affronte aujourd’hui, mais la manière, la comédie d’aventure, parlera autant à un enfant français qu’à un enfant colombien, autant à un enfant chinois qu’à un enfant marocain. Le film est amené à voyager : nous cherchons à ce que notre narration soit universelle, internationale."

Gilles de Maistre explique pourquoi il a choisi Lumi Pollack pour incarner l’héroïne du Dernier jaguar : "Parmi tous les enfants qui passent des auditions, je choisis plusieurs petites filles qui ont une personnalité et qui me semblent être bonnes actrices. Ensuite, il faut les tester avec de vrais animaux pour voir si elles ont peur et choisir celles qui paraissent les plus à l’aise. Lumi est sortie du lot grâce à son naturel, sa volonté et sa capacité à aller vers l’animal. Un dernier facteur essentiel rentre en ligne de compte pour le casting : les parents. Il faut des parents capables d’assumer l’aventure."

"Leur enfant allait tous les jours, pendant de longs mois, passer du temps avec un jaguar – deux en l’occurrence – qui lui sauterait dessus, qui deviendrait de plus en plus gros, de plus en plus fort. Le jaguar est l’animal le plus incontrôlable qui existe, c’est un prédateur solitaire et puissant qui, à l’état sauvage, n’écoute pas l’humain. Je rappelle qu’un jaguar est capable de tuer un crocodile de 4 mètres, dans l’eau, et en quelques secondes. Il faut que les parents aient confiance, qu’ils soient ouverts et aient, eux aussi, une capacité d’apprentissage. Ceux de Lumi étaient très motivés."

Lumi Pollack rêvait d’être comédienne et avait déjà joué auparavant, notamment dans le drame The Fallout. Même si elle joue une jeune fille de 15 ans, elle n’en avait que 13 au moment du tournage. Gilles de Maistre confie : "Elle avait déjà une volonté en acier et a mis toute son énergie dans le projet. Toutefois, elle était déjà syndiquée – à la SAG – et son syndicat, qui est en position de donner son avis, a refusé qu’elle fasse le film ; ils ne comprenaient pas le principe du Dernier jaguar et refusaient de mettre une comédienne de 13 ans en présence d’un animal sauvage. Ils n’entendaient pas qu’il n’y avait aucun risque. Lumi s’est donc mise en vacances du syndicat pour faire le film."

Le film a été tourné avec deux jaguars, qui ont grandi ensemble. Le bébé jaguar de la première scène est Gem, la doublure. Au départ, Gilles de Maistre pensait tourner essentiellement avec elle. Mais l’autre, Hope, s’est avérée beaucoup plus à l’aise devant la caméra. Gem, elle, est devenue dangereuse en grandissant. Le cinéaste se rappelle : "Un an avant le tournage, nous avons démarré l’imprégnation avec Airam, qui incarne Autumn petite. Elle a pu jouer avec Hope et Gem jusqu’à l’âge de quatre mois – ensuite les jaguars ont grandi et c’est devenu risqué pour Airam, alors on a arrêté."

"On a ainsi mis en boîte toutes les premières images. Pendant ce temps-là, Lumi s’imprégnait aussi avec les jaguars, elle jouait avec eux, mais sans qu’on la filme. Ça a duré un an. Puis le tournage de toute la partie du film où Autumn revient dans la jungle et retrouve son jaguar a pu démarrer."

Les jaguars utilisés viennent du Mexique, où s’est déroulé le tournage. Gilles de Maistre a récupéré les jaguars bébés de mains d’éleveurs mexicains, le commerce étant légal dans ce pays, et ils ont été pris en charge tout de suite par les coordinateurs animaliers : "Le jaguar est menacé de disparition totale, essentiellement à cause de la déforestation. Sur toute l’Amazonie et l’Amérique latine, il ne reste que 15 000 individus à l’état sauvage. C’est très très peu et c’est une cause que nous jugeons essentielle de défendre avec Prune, auprès du Grand Public", précise le cinéaste.

Gilles de Maistre a tourné dans des zones très civilisées, où il y a beaucoup de gens. Comme il est impossible de balader un jaguar à droite et à gauche, le réalisateur et son équipe ont "truqué" les décors : "On a construit une fausse rivière, une fausse canopée, on a utilisé des fonds bleus pour donner la dimension qu’on ne peut pas donner dans l’espace où vivait le jaguar. Mais c’est tout. Pour la relation entre l’enfant et l’animal, nous offrons de l’authenticité, de la vérité."

"Utiliser un faux décor ne me dérange pas, mais mon cinéma implique forcément que le jaguar saute sur Lumi lorsqu’ils se retrouvent au bout de trois quarts d’heure de film. On ne peut pas tromper le spectateur."