"One for the money, two for the show, three to get ready". Toute personne normalement constituée devrait connaître ces quelques mots, premières paroles de l'une des meilleures chansons Rock ever, offertes par le King des Kings ( que l'on arrête de dire de Michael Jackson qu'il était le King, "this is bullshit" ), le bien nommé Elvis. Mais voyez-vous, ces quelques lettres résonnent comme une véritable philosophie de vie, et bien loin de simples mots, ils s'avèrent mûrement pensés, et purement établis dans la vie de celui qui les prononça, soixante ans plus tôt. Et cela, cet état d'esprit, John Carpenter l'a compris, alors qu'il mettait sur patte sa biographie de l'artiste, son "Roman d'Elvis", sa propre vision de l'homme. Et cette vision s'avère particulièrement touchante, autant qu'elle surprend de par la vision adoptée au sujet de Presley. "Le Roman d'Elvis" est donc un film très convaincant de la carrière de Carpenter. Bon, à le revoir aujourd'hui, il paraît forcément vieilli, avec quelques relents de série b ( quoi que pas forcément nauséabonds ), mais mince, quand tu vois que le mec a commencé sa carrière de cette manière, tu ressens forcément un petit quelque chose. Enfin, si t'es normal. Après, je sais pas trop comment tu te trouves, psychiquement parlant, alors je m'éviterai de lancer de jugement trop hatif sur ta personne, mais sérieux, j'espère que tu kiffes quand même Carpenter. Ce mec, c'est la vie, le sang de la veine; mieux même, c'est le sang de l'artère vénale qui nous transmet la vie. Ouais, je me mets un peu en mode kikoo, et alors? Plein de gens parlent comme ça, autour de moi. Ne vivrai-je pas dans un monde de fou? Mais je m'égare. Passons. Son travail en tant que photographe est assez remarquable, quand on y pense. Outre le fait qu'il est amusant de le voir débuter au cinéma ( oui, c'est son cinquième film, mais ça fait pas dix ans que le mec est présent dans le game, seulement cinq, ou quelque chose comme ça, en tout cas, c'est environnant ), l'on appréciera notamment son boulot de metteur en scène, aussi habile qu'à l'accoutumée. Beaucoup d'effets de styles sont énormément convaincants, et les ellipses ne viennent pas gêner le doux visionnage de l'oeuvre. De bonnes choses sont imaginées, et convenablement mises en forme; bon, c'est pas non plus du niveau d'un Cronenberg ou d'un Scorcese, mais l'art de Carpenter prend ses bases, et le fait solidement bien, jusqu'à arriver en un point majestueux qu'on lui connaît tous aujourd'hui. Un autre constat, plutôt plaisant, m'est venu à l'esprit, alors que je réfléchissais à ce que j'allais dire, dans cette critique : "Le Roman d'Elvis" m'a en effet donné l'impression qu'il était l'un des films les plus personnels de Carpenter ( je n'irai pas dire qu'il est "The one", parce que je ne les ai pas encore tous vus, mais à mon avis, on n'en n'est pas loin ), tant les sentiments qui s'y trouvaient étaient exacerbés. Dès lors que le film commence, l'on entre dans la tête d'Elvis, de ce grand artiste, de cet homme hors du commun. Au final, c'est vraiment très intéressant, au point que nul ne pourra oser prétendre, je pense, que ce film n'apporte rien, que ce soit à notre personne ou au cinéma en général. C'est d'autant plus intéressant que je suis fan de l'homme en question, et qu'une vision nouvelle de sa personnalité, pourtant peut-être véridique ( après tout, je n'en sais rien, moi, de comment qu'il était, dans la vraie vie ), m'a conduit à le voir différement, à le penser d'une autre manière. Mettre l'accent sur sa mère fut d'ailleurs un point original et pertinent, dans le développement même de l'intrigue de l'oeuvre, notamment lorsque l'on s'informe des rapports qu'il entretenait avec son père, offrant un tout un fort sentiment de nostalgie, et de vulnérabilité ( aussi étrange que cela puisse paraître ). Commençant comme une série b, "Le Roman d'Elvis" surprend de par sa conclusion et la qualité de son écriture, les deux se cloturant au même instant, dans un moment aussi bref qu'élégant, et d'une immense beauté. Une telle fin, ça laisse sur le cul pour une bonne semaine, la bouche ouverte comme un idiot, mais sans pouvoir rien faire pour changer la situation présente. Et puis, faut quand même avouer que le film est majoritairement porté par la prestation incroyable de Russell, d'une intensité sidérante. Je ne le pensais pas si bon. Je l'avoue, je le croyais vraiment limité. Qu'elle ne fut pas ma surprise en le découvrant là, dans la peau du King, gesticulant comme un malade, avec une sacrée gestuelle, bien qu'un peu dans l'excès; mais comment pourrai-je lui repprocher de ne pas danser comme le King? Personne ne pourrait l'imiter à la perfection, si ce n'est lui même, alors bon... Et puis la bande-son, uniquement composée de morceaux d'Elvis, ravit au possible, comme si carpenter, habitué de faire ses propres BO, s'effaçait pour laisser la parole à l'homme derrière le personnage, à l'homme derrière l'acteur. Oui, je vous le concède, c'est vraiment du balaise. C'est hallucinant, oui. Bien loin des artifices que l'on aurait pu attendre d'un tel film, le métrage en question se démarque par sa sensibilité, son intelligence et son émotivité croissante. Oeuvre toute particulière d'un artiste tout aussi particulier, "Le Roman d'Elvis" est une série b fort sympathique, un véritable bonheur pour le fan que je suis. "One for my pleasure, two for the fans, three for the show".