A la vision de "Le grand changement", il n’est pas interdit de penser au cinéma du thaïlandais Apichatpong Weerasethakul. En effet, on retrouve dans ce film, comme dans d’autres films réalisés en Amérique du Sud ou en Amérique Centrale, comme, par exemple, "La danse du serpen"t de Sofia Quirós Ubeda, cette rencontre subtile entre monde du réel et présence du surnaturel. Il n’a d’ailleurs pas été étonnant de constater que c’est en Colombie que Apichatpong Weerasethakul a réalisé "Memoria", son film le plus récent ! Toutefois, tout en étant souvent très onirique, tout en étant aussi souvent proche d’un cinéma expérimental, avec des images déformées et une utilisation très particulière du son, "Le grand mouvement" est aussi un véritable documentaire sur la Bolivie, une Bolivie en pleine évolution, partagée entre survivance du passé et modernisme, vieilles croyances impliquant le diable dans l’apparition d’une maladie face à la médecine moderne, vieilles demeures branlantes face à des habitations contemporaines. Dans ce film tourné en 16 mm, le côté documentaire est d’autant plus sensible que les comédiens et comédiennes sont tou.te.s des non professionnel.le.s. Max Bautista Uchasara, l’interprète de Max, le réalisateur le connait depuis 2004 et il n’imaginait pas réaliser son film sans sa présence. Même si, gêné par la présence de la caméra, il a été finalement moins présent que ce qu’en attendait Kiro Russo, il lui a apporté beaucoup en lui montrant des choses qu’il ne connaissait pas, qu’il n’avait jamais vues. Film souvent déroutant, Le grand changement est une expérience cinématographique qui mérite d’être vécue.