Dieu sait si les longs-métrages consacrés à l'adolescence, vue comme un passage et un apprentissage, sont légion, pour le meilleur et pour le pire. Dans Camila sortira ce soir, la cinéaste argentine Inés María Barrionuevo apporte un peu d'air frais, dans ce genre saturé, avec une finesse d'exécution, un raffinement et une subtilité très rares. Sa mise en scène ouatée et son art de la transition entre les scènes, par des ellipses intelligentes, n'impose jamais son regard singulier par la force mais bien par une douceur teintée de mélancolie, qui n'en est pas moins puissante, presque davantage pour ce qu'elle suggère que pour ce qu'elle montre. Dans le portrait de Camila qui, du haut de ses 17 ans, toise et défie les valeurs du patriarcat et de la tradition aliénante incarnée par un lycée catholique, se dessine une génération de jeunes femmes engagées (mais pas nécessairement enragées) bien décidée à lutter pour disposer de leur corps, sans avoir de compte à rendre. L'aisance avec laquelle la réalisatrice réussit à aborder tous les thèmes inhérents à la représentation de cet âge de tous les possibles, de la relation mère/fille au harcèlement, en passant par la découverte de la sexualité, est assez sidérante. L'interprétation est à la hauteur des ambitions du scénario, avec en premier lieu la presque débutante et remarquable Nina Dziembrowski, souvent filmée en gros plan.