Si “Close” a reçu le grand prix du festival de Cannes 2022, c’est qu’il fait profondément penser au modèle de société dans lequel nous restons enfermés,
où la mort reste un tabou
, exempt de communication. Ce que je n’aime pas, c’est qu’il véhicule ce modèle. Les films qui sortent au cinéma incarnent le changement d’une société ; avec “Close”, j’ai l’impression qu’elle stagne dans sa manière d’être et de s’exprimer. Le silence fait partie du deuil, je ne le nie pas, mais il n'apporte rien en soi de laisser ses émotions sous silence et d’en faire une valeur forte dans un film. “Close” part d’une bonne intention, mais je n’aime pas l’approche du film, très timide au niveau de l‘expression des émotions par la parole. Ajouter cette difficulté à s’exprimer, cela renforce le pathos dans un long-métrage, comme on le sait si bien le faire dans le cinéma européen, sans pour autant apporter quelque chose de constructif pour faire avancer la narration. “Close” apporte peu au paysage cinématographique, malgré une belle esthétique et une appréciable technicité. Même si la lumière est recherchée, les cadres et portraits travaillés, les aller-retours incessant entre plan-séquences calme/chuchoté/silencieux, suivi des plans de hockey sur glace/cours de récréation/vie de famille deviennent vite répétitif. D’ailleurs Léo (Eden Dambrine) semble rapidement effacé du groupe scolaire dans lequel il évolut, l’intention première derrière la caméra est de montrer la vie et les doutes de Léo sur son existence, face au trouble de la mort de son ami. Dès lors, seul Léo compte, et tout le reste semble effacé avec des personnages qui ont peu de relief, aussi bien pour les parents de ce dernier que son frère. La cause de la mort est elle-même suggérée, elle parait aussi floue, qu’elle est irréel :
la souffrance de Remi, (Gustav De Waele) semble bien trop brève pour en arriver à la crédibilité d’un suicide
. Malheureusement, ce n’est pas l’expressivité que j’attends du cinéma, j’ai besoin d’un minimum de dialogue pour sentir la construction des personnages et leurs évolutions.
Le mot “mort” ou “suicide” ne sont d’ailleurs pas énoncé une seule fois dans le film
, pour renforcer cette timidité des mots et du deuil. J’ai été touché sur certaines scènes silencieuses, mais malheureusement trop ponctuées avec des scènes de dialogue très terre à terre, qui déçoivent tellement elles n’affrontent pas le sujet de face.