"Je rends, donc je suis" ? Vomito ergo sum ? Le voilà, le film à scandale de l'édition 2023 du Festival de Cannes, il y en a toujours un, qui vient en touriste (il ne cherche pas de prix) mais compte beaucoup sur le buzz à sensations qui s'emparera de la Croisette, lui faisant sa meilleure publicité. Club Zero prévient heureusement, placardant dès son ouverture un énorme avertissement pour les personnes qui sont sujettes à l'anorexie, à la boulimie, ou sont sensibles aux troubles alimentaires. À ce stade, tout le monde se demande dans quoi il s'est embarqué, et si le début et milieu du film sont assez doux, voire satiriques, avec le sujet de l'impact écologique réduit en mangeant drastiquement moins de nourriture, on ne s'attend pas à la montée en tension exponentielle dans la dernière partie, qui fait exploser tout le potentiel de son intrigue, dérange, met mal à l'aise, nous perd un peu dans son discours trop content de jouer avec la nourriture et d'en mettre partout, dont une scène-choc en particulier a fait partir certains spectateurs, écoeurés. Pour notre part, on dira que cette fameuse scène nous a marqué :
on voit les parents être soulagés que leur fille recommence à manger normalement (on est en train d'espérer vainement avec eux que ça soit une réalité), que cette dernière leur rétorque que "ils n'ont pas compris, on peut manger, si on sait se faire vomir.", qu'elle se met à dégobiller en face caméra...et remange son propre vomi.
Club Zero, à partir de cette scène-climax, va malheureusement se vautrer dans un final très attendu, incohérent avec son propos de base (si, comme la jeune fille dit, ils peuvent manger s'ils vomissent, où est la réduction d'impact écologique ? Ils consomment autant, et tirent même la chasse d'eau une fois de plus... C'est contre-productif), et ambigu sur la dernière image qu'il donne (on aurait préféré que le final montre
les jeunes idiots en train de souffrir et de mourir de faim, comme un aveu de leur embrigadement qui termine mal, plutôt que de laisser cette mort cachée et même "positive" avec le plan doucereux du Jardin d'Éden où les élus sont récompensés de leur comportement...
Pour nous, encore contre-productif). On saisit pourtant bien la critique sociale de ces jeunes riches qui s'ennuient, ont tout mais font encore la fine bouche, s'attellent à ne plus manger quand, à l'inverse, des milliards de pauvres s'évertuent à essayer de trouver un repas chaud. On adore aussil'humour grinçant qui tourne en ridicule cette professeure (excellente Mia Wasikowska) qui est un gourou moderne, la version extrémiste des militants écologistes (le film va agacer certains vegans...). La musique rythmée est au début très appréciable (des sortes de tam-tams frappés frénétiquement) avant de devenir un refrain trop présent, qui lasse. Il n'en reste pas moins que Club Zero donne une envie de pousser les portes du premier restaurant venu, et de commander votre plat favori version XXL. Cynique, choc, malsain sur les bords, le film se perd un peu à la fin, mais nous imprime en tête cette horrible scène de "re-consommation"... On espère que vous avez l'estomac bien accroché, et on ne vous souhaite pas un bon appétit.