Kakhi est un vieux Géorgien qui fut, dans sa jeunesse champion de lutte. Son frère est un joueur compulsif qui dépense au jeu l'argent que sa femme, qui a émigré à Brooklyn, lui envoie chaque mois pour rénover leur appartement. Son fils, Soso, qui a lui aussi émigré aux Etats-Unis pour y faire des études de médecine, suit le même chemin. Aussi Kakhi décide-t-il de se rendre à New York. Il y retrouve sa belle-soeur qui gère la pension de famille où son fils végète. Soso doit une importante somme d'argent à un caïd russe de la pègre. Son père est prêt à tout pour sortir son fils de la mauvaise passe dans laquelle il s'est enfermé.
"Brighton Beach" est ce quartier de Brooklyn en bord de mer où la diaspora soviétique a convergé avant d'essaimer vers le reste des Etats-Unis. James Gray en avait fait en 1994 le cadre de son premier film, "Little Odessa", dont l'ombre intimidante plane au-dessus de "Brighton 4th". On y retrouve le même souci quasiment anthropologique, de radioscoper un quartier où, dans un joyeux Babel linguistique, se croisent toutes les populations de l'ex-URSS.
À cette radioscopie quasi-documentaire s'ajoute une tragédie grecque qui raconte la décision héroïque d'un père de sauver son fils, au péril de sa vie. Le rôle de Kakhi est interprété par un ancien lutteur professionnel, double champion olympique et quintuple champion du monde dans les 70ies. Il a encore, à soixante-dix ans passés, la stature du rôle ; mais le manque d'expérience de cet acteur amateur se ressent dès qu'il a quelques lignes de texte à dire.
On ne va pas se mentir : l'intrigue est bidon. Elle est un prétexte pour filmer la communauté géorgienne hors les murs (ou hors les montagnes). Les histoires d'argent passent vite au second plan car le plaisir ne vient pas de là mais des scènes traditionnelles ou incongrues filmées par Levan Koguashvili. Ce n'est pas une oeuvre inoubliable mais l'Ouzbek et les chants géorgiens justifient l'achat du ticket. Original.
Brighton Beach est le quartier New-yorkais où les migrants venus de l'ex-URSS débarquent sur le sol américain, ils se posent dans ces rues où les écritures sont en cyrillique avant de tenter l'aventure américaine. Ou pas. Ici un ancien lutteur géorgien vient porter secours à son fils empêtré dans des dettes de jeux. Il flotte un petit air du "Little Odessa" de James Gray sur ce film sans pour autant atteindre la puissance narrative et la qualité de la mise en scène du cinéaste new-yorkais.
"Quand il n’y a plus d’espoirs, c’est sur la famille qu’il convient de parier. Levan Koguashvili (Street Days, Blind Dates) croit en la rédemption de ses personnages, tandis que James Gray a traversé Little Odessa (l’autre nom de Brighton Beach) avec de plus sombres intentions. De confession juive ou orthodoxe, ce lieu emblématique entre Manhattan Beach et Coney Island abrite essentiellement tout le post-union soviétique en Amérique. Le cinéaste nous emmène alors au plus proche des habitants, qui titubent pour la majorité vers un fossé dans lequel ils auront du mal à s’extirper."
"Pas toujours séduisant dans la construction du portrait qu’on y fait du quartier, Koguashvili préfère sauver les habitants plutôt que les meubles. Avec l’humour à sa portée et une troupe chaleureusement accueillante, le réalisateur se projette un peu aux côtés de ses personnages et c’est ce qui les rend particulièrement attachants. Son bref passage en compétition de Reims Polar ne lui rend cependant pas honneur, sachant que Brighton 4th préfère le chant du « rossignol » au climat policier."
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Voyage de Tbilissi à New-York sur la trace de Géorgiens qui, avec courage, affrontent une réalité plus ou moins sordide et tentent de survivre à l'exil. Le film se passe aux marges de New-York dans un immeuble situé à Brighton 4th. Il montre une belle galerie de portraits ou chacun oscille entre sa part d'ombre, cupide, roublarde, moche et sa part de bonté, de joie et de solidarité. Un film âpre sur la noirceur et la grandeur de l'âme humaine.
Ce film sera surtout apprécié des initiés : Brighton Beach, à une encablure de Manhattan, est un quartier qui abrite depuis les années 90 les communautés exilées de l'URSS. Toutes ces communautés charrient leurs cultures, créant un malstrom de musiques, de cuisines, le tout cimenté par la vodka. Ici, c'est le parcours d'une famille géorgienne qui est retracée, avec son cortège de particularités : "mama " qui veut dire "papa" (seule langue au monde), magnifiques chants polyphoniques, produits authentiquement "bio", lutte traditionnelle, recours épisodique au mensonge (on ne sort pas intact de 70 années d'occupation)... On savourera la spectaculaire trêve autour d'alcool et de zakouski, qui n'est pas sans rappeler celle des Tontons Flingueurs.
Kakhi incarné par Levan Tediashvili, un ancien champion olympique de lutte, quitte son appartement de Tbilissi pour rejoindre son fils Soso à Brooklyn. Ce dernier n'étudie pas comme il le devrait et il est criblé de dettes. Mentir semble être monnaie courante, car Kakhi a lui-même une discussion avec un homme resté au pays qui a perdu tout l'argent envoyé par sa femme qui se tue à la tâche aux Etats-Unis pour leur offrir une vie meilleure. Si certaines personnes semblent irrécupérables, Kakhi n'abandonne pas même si son fils ne met pas beaucoup de bonne volonté pour s'en sortir. Malgré les années, cet homme ne va reculer devant rien pour aider son fils. Avec ce film, Levan Koguashvili dresse le portrait d'un homme bon, d'un grand gaillard au cœur tendre, mais aussi un portrait intergénérationnel en appuyant sur la différence de mentalité entre les générations. Kakhi n'est pas le plus expressif, mais il parle avec ses actes. L'histoire manque un peu de structure, car le personnage fait parfois des choses qui n'apportent pas grand-chose au film, mais je retiens surtout le sacrifice de cet homme attachant. Bref, c'est classique et touchant.
Le rôle principal de Brighton 4th, sélection de la Géorgie pour l'Oscar 2022 du meilleur film international, est tenu par une véritable légende de la lutte, dans son pays. Ce double champion olympique, pour le compte de l'URSS, de santé désormais fragile, colle parfaitement à son personnage dans le film de Levan Koguashvili, ancien lutteur qui vient en aide à son fils, émigré en Amérique et criblé de dettes de jeu. Brighton 4th en profite pour dresser le portrait de la petite communauté géorgienne, installée à Brighton Beach, à Brooklyn, qui survit d'expédients et affiche une solidarité sans faille. Il n'y a pratiquement aucun américain dans le film, même si celui-ci se déroule pour la plus grande partie à New York, les Géorgiens ne se côtoyant qu'entre eux, voire avec d'autres émigrés issus de Russie, du Kazakhstan ou d'Ouzbékistan. Tout en sobriété et sans aucune lourdeur, le film diffuse une vraie chaleur caucasienne, qui se diffuse par le chant, les repas ou ... la lutte. Dans cette petite Géorgie, Koguashvili décrit avec une humanité jamais démonstrative un foyer d'exilés qui se réchauffent mutuellement, plus vrai que nature.