CHEVALIER
Un film de Brian Helgeland
Après s’être attaqué au polar avec un premier film noir et décalé (cf. Payback), le metteur en scène américain a décidé d’illustrer les tournois de chevaliers du Moyen Âge à sa façon.
A mi-chemin entre parodie et fresque épique, Chevalier nous ouvre les portes d’un univers qui regorge de princesses et dames de compagnies rayonnantes, de chevaliers plus ou moins preux et de paysans toujours prêts à faire ripaille. Dans ce monde haut en couleurs, chacun poursuit son petit bonhomme de chemin, les nobles comme les gueux, à l’exception d’un jeune fils de couvreur qui lui ne se satisfait pas de son sort. Il s’appelle William.
Sa condition ne lui plaît guère, et quand ce jeune écuyer assiste à la mort du chevalier qu’il sert, le voilà convaincu d’une intervention du destin. William y voit l’occasion de se faire un nom et une place dans la noblesse, après toutes ces années passées à observer son maître à l’entraînement. Remplaçant au pied levé son défunt maître, il participe à son premier tournoi avec un certain bonheur, ce qui renforce son impression d’avoir là l’occasion de changer le cours de son existence. Mais pour participer à de nouvelles joutes, il lui faut endosser une nouvelle identité, celle d’un noble. Ce sera chose faite lorsque son chemin croisera celui de l’écrivain désargenté Jeffrey Chaucer. Ce dernier rédigera des lettres de noblesses pouvant faire illusion, lui ouvrant ainsi « officiellement » les portes de grands tournois.
Dès les premières images, le spectateur comprend qu’il ne s’agit pas d’un hommage à un genre aujourd’hui oublié. Dans Chevalier, la foule amassée dans les tribunes ne se contente pas de pousser des oh ! et des ah ! pour manifester ses émotions ; elle accueille également les participants en scandant de grands standards du rock, tel le « We will rock you » de Queen. Passée la première réaction d’étonnement amusé (ou d’indignation, c’est selon), le spectateur est jugé prêt à accepter d’autres libertés.
Brian Helgeland a placé son film sous le signe de la parodie, sans pour autant traiter par le mépris les éléments incontournables du genre. Si les costumes et le vocabulaires paraissent en effet décalés – un doux euphémisme au vu des coiffures et tenues qu’arbore notamment la damoiselle Jocelyn –le propos du film reste cependant concentré sur le désir profond d’un homme qui aspire à la grandeur et qui va se donner les moyens de parvenir au sommet.
L’interprétation sert à merveille les intentions du film, à commencer par un Paul Bettany visiblement inspiré (il pare l’écrivain Chaucer d’une verve intarissable) et un Rufus Sewell suintant un mépris presque palpable, sans oublier Heath Ledger, dont le charme et la fraîcheur collent parfaitement à l’ambiance du film. Après plus de deux heures de spectacle, le spectateur sort de la salle à la fois joyeux et dépaysé.