Après « Les Femmes du Bus 678 » et « Clash », l’égyptien Mohamed Diab investit la Cisjordanie en quête de fracture sociale à cerner. C’est à travers un jeune personnage qu’il traite d’un sujet rare sur l’insémination in-vitro, dans un lieu où cela pourrait être plus que tabou, car les racines biologiques viendront s’effondrer sur le petit monde d’Amira (Tara Abboud). Si elle ne semble pas forcément significative du pays tout entier ou des enjeux qui entourent le conflit israélo-palestinien, le récit met les pieds en plein dedans, peut-être sans le vouloir et surtout sans éclat de mise en scène. Il reste pourtant de la matière à étudier, là la jeune fille qui se révèle alors comme ennemi d’état devra prouver sa loyauté. Malheureusement, cet aspect sera éclipsé et confondu avec la culture arabe, ce qui sera assez ambigu et compréhensible d’entendre les vagues de haines qui se sont abattues sur le projet.
Habile pour des photomontages et autres reconstitutions de photos de famille, la passion d’Amira accentue la distance qui la sépare de ses parents. D’abord de son père Nawar (Ali Suliman), emprisonné en terre israélienne et sa mère Warda (Saba Mubarak), qui semble porter sur elle seule une culpabilité insondable. Mais la vérité finira par éclater et ce qui finira par questionner la jeune fille, c’est sa légitimité à porter d’étendard de la haine pour elle. Ce sujet n’est pas nouveau, mais a le mérite d’être développé dans un contexte surprenant. Pourtant, tout ce qui relève du dysfonctionnel, empiète sur la subtilité d’écriture, car chaque fait est illustré, expliqué, puis réexpliqué à nouveau. Cela pourrait constituer une boucle intéressante dans la manière qu’a la jeune adolescente à percevoir le drame social qui l’embarque dans des choix cornéliens. Cependant, il faudra attendre le dénouement pour y mettre les pieds et ce sera trop tard.
Avant cela, ce sont des allers-retours au parloir d’une prison, où le père, rêve de son statut de patriarche, alors qu’il ne parviendra probablement jamais à entrer en contact direct avec sa famille. Sa descendance semble être l’unique moyen afin qu’il puisse exister à travers leurs yeux et leur ambition. Il devra toujours se munir d’un téléphone pour communiquer avec ses proches ou entrer en communion avec eux. Les relations sont ainsi basées sur une mauvaise écoute et une absence, qui condamne Amira à s’attacher à une frustration qu’elle ne contrôle plus. À l’image de ses montages photo, c’est l’exemple même d’un portrait de famille incohérent, où chaque membre reste dans sa propre bulle et fantasme sur un collectif tout aussi impossible à acquérir. Quand bien même les oncles, les tantes, le professeur et le petit-ami s’échinent à protéger la jeune fille, tout finit par entrer en contradiction avec une idéologie politique et religieuse.
On serait rapidement tenté de soutenir l’approche du film, mais le véritable enjeu du sperme clandestin surplombe sa grande réflexion par des motifs, taillés pour la provocation. Mais au-delà des polémiques et autres réactions à son encontre, la tension de l’intrigue demeure stérile, sinon parasitée par le parti-pris de dialogues qui tournent en rond. Ce qui est raconté aurait pu emprunter plusieurs raccourcis, afin de mieux explorer cette fameuse quête identitaire, en confrontant davantage « Amira » à l’environnement hostile, absurde et extrémiste de son environnement. De même, les femmes n’auront ni assez de force ou de conviction pour réellement exister en tant que tel, hormis le soupçon de rébellion d’une adolescente qu’on aura vite fait de museler, du fait de son caractère impulsif, mais admirable.