Un film formidablement original -qui certes part un peu dans tous les sens, manipule un peu trop de personnages, mais qui fait de cette jeune femme de père allemand, Alice Rohrwacher, la digne héritière de Fellini dont on retrouve les trognes picaresques et les vamps obèses... et qui renoue avec cette italianité du cinéma des années 60, devenu maintenant tellement impersonnel!
Cela se passe sur les bords de la mer Tyrrhénienne, un paysage dévasté par une industrialisation anarchique et un rivage où le sable est pollué par le mazout, mais dont le sous-sol est truffé de tombes étrusques..
Arthur (Josh O'Connor, excellent à traduire la complexité du personnage -âme tourmentée, colérique, irrésolue) vient de sortir de prison. C'est l'hiver et il ne porte qu'un pauvre costume d'été; il rejoint son village, enfin celui qu'il a adopté puisqu'il est anglais et ne parle même pas très bien l'italien, où il vit dans une sorte de cage à poules, et il va tout de suite voir Flora (Isabelle Rossellini.... vieille dame maintenant...),
la mère de son grand amour, Beniamina, disparue -morte sans doute-
Flora vit dans une masure qui fut sans doute une belle demeure noble, où il pleut de partout et où des restes de fresques apparaissent sur des murs qui s'écroulent. Elle esclavagise Italia (Carol Duarte, pleine d'une vitalité réjouissante) qui lui sert de bonne sous couvert de prendre des cours de chant.
Il est vrai qu'elle dissimule ses deux enfants, cette coquine d'Italia...
Il y a quelque chose entre ces deux là, Arthur et Flora,
l'amour commun de Beniamina sans doute.
Mais Arthur a d'autres amis, moins reluisants ceux là. C'est qu'il a un don, Arthur.
Muni ou non d'une baguette de coudrier, il est capable de détecter les vides dans le sol. Et un vide: ça veut dire une tombe étrusque
. Cette bande de bras cassés, les tombaroli, vit de cela; c'est là qu'on retrouve toute la virtuosité du cinéma italien des grandes années, pour magnifier les pouilleux, les marginaux, les rêveurs.... car s'ils vivotent en revendant de jolies poteries d'animaux trouvées dans les tombes, il rêvent tous de la découverte de l'oeuvre d'art ultime qui les ferait milliardaires...
sans même penser que, au dessus d'eux, il y a des critiques d'art, des amateurs d'art de la plus haute société qui feraient main basse sur leur trouvaille. La jolie Alba Rohrwacher, la petite soeur, interprète Frida, une de ces escroques de haut vol.
Vous voyez, c'est une magnifique idée de départ, mais qui emprunte toutes sortes de chemins de traverse; de la poésie, de l'onirisme; des chansons, des bals, des fêtes, des matrones girondes aussi peu honnêtes que leurs compagnons, des paysages qui passent du sublime au sordide. Et Arthur, tellement seul, désemparé...
âÂÂ