Tout en musique
Depuis 2010 et son savoureux Le Nom des gens, j’adore le cinéma de Michel Leclerc. 3 très bons films me sont restés en mémoire, Télé Gaucho, La vie très privée de Monsieur Sim et La Lutte des classes. C’est donc avec la plus grande des confiances et un soupçon d’excitation que je mes suis rendu au ciné pour ces nouvelles 110 minutes de comédie. Marcia, jeune chanteuse passionnée, enregistre un album avec son idole Daredjane, icône rock des années 1970, qui disparait soudainement. Pour sortir leur album, elle doit convaincre l’ayant-droit de Daredjane, Anthony, placier sur le marché d’une petite ville, qui n’a jamais aimé sa lointaine parente et encore moins sa musique. Entre le bon et le mauvais goût, le populaire et le chic, la sincérité et le mensonge, leurs deux mondes s’affrontent. À moins que l’amour, bien sûr... 110 minutes après, je sors heureux de ce film magique, bourré d’idées, de pudeur et… de musique. Enfin un bon film français.
S’il retrouve ses sujets de prédilection comme le rapport aux classes sociales, l’héritage familial et la comédie romantique, Michel Leclerc inclut dans ce petit bijou, sa passion pour la musique. Ici, La musique, et la chanson en particulier, sont un marqueur social et culturel fort qui lui permet de parler de lutte des classes. Le personnage de la chanteuse Daredjane est fortement inspiré par Brigitte Fontaine, Catherine Ringer – le prénom de l’héroïne, Marcia, n’a pas été choisi au hasard -, et Patti Smith. Le sens du détail de notre réalisateur lui a permis de créer de toutes pièces toute une carrière fictive allant de ses débuts dans les années 60, où elle toute timide avec ses chansons à texte très Rive Gauche, jusqu’à un style hyper-rock complètement déjanté, très provocateur. 4 musiciens ont composé les musiques, dont Michel Leclerc lui-même qui a également signé tous les textes. Et, aussi incroyable que cela puisse paraître, on sort du cinoche en chantonnant certaines desdites chansons… Une prouesse. Enthousiasmant et mélancolique, cette comédie d’une grande subtilité nous parle des présupposés de classe, de snobisme culturel et d’héritage artistique… et de beaucoup de musique dans un vibrant hommage amoureux à la chanson française. Plein de charme.
Rebecca Marder, qu’on a déjà remarquée dans Une Jeune fille qui va bien, fait partie de la Comédie Française et, à ce titre, outre son talent immense, elle sait tout faire y compris chanter. Elle illumine cette comédie romantique. Elle trouve en Félix Moati et la délicieuse Judith Chemla, méconnaissable, deux formidables partenaires de jeu. Citons aussi Philippe Rebbot, Eye Haïdara, et les apparitions d’Artus et François Morel. Un casting de choix pour une pépite bien de chez nous. Merci à Michel Leclerc.