L’ultime traversée de Paris
La carrière de Christian Carion avait plutôt bien commencé avec 3 bons films, Joyeux Noël, L’affaire Farewell et En mai, fais ce qu’il te plaît. Puis, patatrak, les deux suivants étaient assez banals, voire navrants. Hélas pour ces 100 minutes de comédie dramatique, il fallait surtout ne pas avoir vu la bande-annonce… mais vu le matraquage, il était difficile d’y échapper. Madeleine, 92 ans, appelle un taxi pour rejoindre la maison de retraite où elle doit vivre désormais. Elle demande à Charles, un chauffeur un peu désabusé, de passer par les lieux qui ont compté dans sa vie, pour les revoir une dernière fois. Peu à peu, au détour des rues de Paris, surgit un passé hors du commun qui bouleverse Charles. Il y a des voyages en taxi qui peuvent changer une vie… Et à la lecture du pitch, on se rend compte que ce n’est pas la peine de s’enfermer dans une salle obscure, on pense avoir déjà tout vu, tout compris…
Alors, il restait à découvrir la manière dont ce sujet allait être traité. Carion tenait là une excellente histoire, un duo d’acteurs au top, mais il lui a manqué le culot, le courage d’oser un vrai huis clos. Car les surprises ne manquent pas. Le récit est très fort, parfois bouleversant. Mais je pense qu’il se suffisait à lui-même et que la méthode du flash-back systématique plombe l’ensemble du film. Des sons, des apparitions fantasmées – il y a en a d’ailleurs une tout à fait émouvante -, dans le taxi auraient du suffire – avec un peu d’habileté dans l’écriture -, à nous faire vivre ce dernier voyage d’une vieille dame au passé pour le moins tourmenté. A l’arrivée, du gros mélo tout dégoulinant, en particulier la toute fin. La parole est un merveilleux véhicule de l’émotion, et curieusement, dans ce film, l’image devient presque superflue. On a, à la fois, la grâce du duo enfermé dans le taxi et la reconstitution lourdaude et caricaturale à souhait. On est autant emporté par la beauté de Paris et les confidences des deux héros, qu’agacé par les artifices scénaristiques et les surenchères lacrymales. Beaucoup de regrets.
Line Renaud, 94 ans, dans son plus beau rôle, fait de ce récit doux-amer, en forme de testament, un moment simplement déchirant. Elle met dans ce drame des adieux un optimisme radieux, un humour malicieux et une touchante sincérité. Quant à Dany Boon, il prouve enfin qu’il peut être un formidable acteur dramatique. Avis aux amateurs ! Alice Isaaz et Jérémy Laheurte complètent le haut de l’affiche. On passe à côté d’un grand film à cause du manque de courage, ou d’imagination d’un scénario paresseux. Quel dommage ! A voir pour le duo Line Renaud / Dany Boon.