S’il y a bien quelqu’un pour qui La Prison de Verre n’est pas un long-métrage anodin, c’est bien le réalisateur Daniel Sackheim. Et pour cause, il s’agit-là de son seul et unique film sorti à ce jour dans les salles de cinéma, faisant partie d’une filmographie essentiellement composée d’épisodes de séries TV cultes (allant de The X-Files à Game of Thrones, en passant par Urgences, Dr. House et Lie to Me). Mais mise à part lui, peu de gens se souviennent de ce thriller qui s’est plutôt fait un nom lors de sa sortie dans les bacs. Sinon, ce fut l’indifférence la plus totale (un budget de 22 millions de dollars à peine remboursé dans le monde entier). À juste titre ? C’est ce que nous allons voir avec cette critique.
La fin des 90’s et le début des années 2000 n’ont pas spécialement été tendres avec les polars et autres thrillers hollywoodiens. En même temps, les producteurs ne comptant que sur le star system (assurer le succès du projet rien que par la présence de têtes d’affiche) ne parvenaient plus à convaincre le public en lui livrant des œuvres sans âme (et ça continue encore de nos jours). Aussi, beaucoup de longs-métrages de ce calibre se sont littéralement cassés les dents, sans être restés une seule seconde dans les mémoires (il suffit de prendre le récent exemple évoqué avec la critique de Pas un mot…). Ainsi, le spectateur ne semblait donner sa chance qu’à des films qui rimaient avec nouveauté et efficacité. Et sur ce point, La Prison de Verre répondait présent à cette demande sur le papier. Rien qu’au niveau du casting, qui ne proposait que des comédiens peu connus (Leelee Sobieski et Trevor Morgan) face à des noms plus imposants sans que ces derniers ne les vampirisent (Stellan Skarsgård, Diane Lane, Bruce Dern). De plus, le film de Daniel Sackheim se présentait sans aucune prétention si ce n’est celle de divertir le public. En somme, ce dernier avait pas mal d’atouts en poche pour se faire remarquer et même intriguer !
Et quand démarre le long-métrage, nous ne pouvons que poursuivre sur cette argumentation. Certes, il n’y a rien d’original dans ce thriller où se réunissent personnages clichés et grosses ficelles d’écritures pouvant faire défaut au suspense de l’intrigue. Mais même malgré cela, la base scénaristique de l’ensemble (ces deux orphelins se confrontant à deux tuteurs bien trop généreux et inquiétants) s’avère être diablement prenante. Celle-ci, aidée par des comédiens plutôt convaincants (dont un Stellan Skarsgård pour le moins délectable) et une mise en scène menée avec savoir-faire, parvient à nous captiver avec facilité, nous plongeant dans une affaire tortueuse qui malmène ses jeunes protagonistes principaux. On s’attache à eux sans problème, faisant fi de cette impression de déjà-vu pour essayer de découvrir le fin mot de l’histoire. De la part d’un thriller hollywoodien qui n’a que pour seul but de divertir, autant dire que c’est plaisant à voir : La Prison de Verre, sans passer par d’inutiles artifices bien trop tape-à-l’œil, possède une histoire qui a de quoi assurer le spectacle tout en intéressant son public sans jamais le perdre de vue.
Malheureusement, c’est pourtant ce manque de prétention qui va causer du tort au long-métrage. Car La Prison de Verre avait en mains un décor qui aurait très bien pu offrir d’excellentes perspectives d’écriture et de réalisation : la maison de la famille Glass. Immense villa pratiquement de grandes baies vitrées au charme fou, et qui pourtant ne dépasse jamais le statut de simple lieu d’action. Je rappelle qu’il s’agit du titre du film, qu’il soit français ou bien anglais (The Glass House), quand même ! Mais alors qu’il pouvait se permettre quelques images et autres métaphores (la transparence, les faux-semblants…) ou bien une caméra circulant avec aisance dans les nombreuses pièces de la maison pouvant donner du dynamisme à l’ensemble (comme fera plus tard David Fincher avec Panic Room), Daniel Sackheim et Wesley Strick ne font rien d’autre que le minimum syndical, à savoir dérouler paisiblement l’intrigue comme si de rien n’était, jusqu’à un final traînant bien trop la patte à en devenir grotesque. Du coup, La Prison de Verre ne va pas plus loin que le polar lambda hollywoodien alors qu’il aurait très bien pu sortir son épingle du jeu en ne négligeant nullement ce détail.
Livrant au public un thriller de bonne facture qui puisse convenir à un dimanche soir, La Prison de Verre n’aura cependant pas su s’imposer à cause de son allure archi classique et gâchant son potentiel aussi grosse qu’une maison (le décor principal). Se présentant tel un énième thriller comme il en existe tant d’autres, il est normal que le long-métrage de Daniel Sackheim n’ait pas connu le succès lors de sa sortie en salles. Comme quoi, un simple détail du scénario et du tournage peut tout changer !