Chaque œuvre de Gaspar Noé est une expérience, souvent traumatisante, parfois à base de provocation et d'images hallucinées. Vortex se place dans un registre différent, dépouillé et faussement documentaire, mais ce qu'il exige du spectateur est immense, dans cette étude au noir qui ne laisse aucune place à la fantaisie. "On est bien peu de chose" (Mon amie la rose) interprète une Françoise Hardy juvénile, en ouverture du film, mais c'est bien son seul moment apaisé. D'emblée, le procédé du split screen divise l'attention : il n'est pas sûr qu'il soit bien utile, se dit-on, avant de se raviser et de comprendre qu'il est un moyen de montrer deux personnes, qui forment un couple depuis longtemps, qui s'isolent de plus en plus dans leur propre univers malade. Ce véritable crépuscule des vieux, dans la violence d'une dégénérescence annoncée, prend à la gorge et ne se desserre jamais, y compris quand le fils, irresponsable, daigne visiter ses vieux parents. Jusqu'au bout, Gaspar Noé maintient la note dans une atmosphère irrespirable que l'on ne peut comparer qu'à Amour de Haneke, auquel il n'est pas interdit de penser. Dans un rôle dément, c'est le cas de le dire, Françoise Lebrun dépasse l'entendement, niveau auquel ne saurait prétendre Dario Argento, dont le manque d'expérience d'acteur se fait parfois sentir. Quant à Alex Lutz, il élargit encore sa palette dans un rôle complexe dont il se tire bien. Certains cinéphiles, pour le moindre film marquant, utilisent le terme galvaudé de "claque." Et Vortez, ce serait quoi, alors ? Un KO assené par les poings de Mike Tyson ?