Il y a un peu de l’ambiance de « Welcome » (2009). Même fond, des migrants sur un terrain vague qu’on a fini par nommer« jungle » et qui attendent l’occasion pour passer clandestinement en Angleterre. Qui dans un camion, qui dans une embarcation de fortune, qui avec l’assistance d’un passeur. C’est le lieu des rackets, des conflits interethniques, de l’entraide parfois aussi.
Si dans « Welcome », l’assistance apportée visait à faire preuve d’humanité sur fond de reproche familial de vivre bien dans son monde et petit confort quoique modeste sans se préoccuper du reste, ici il s’agit d’une mère de famille « célibataire » (lire élevant seule son fils bien que sa mère soit aussi présente si besoin) et qui a du mal à joindre les deux bouts. La chaudière hors d’âge de son appartement sans luxe ni confort est hors service. Elle a besoin de 2000 € pour la changer. Lui viendra l’idée, pour ce prix-là (très compétitif, moitié moins que ce qui se pratique déjà sur la place), de dissimuler un passager dans le coffre de son véhicule automobile et de prendre le ferry pour traverser la Manche. A destination, la famille et/ou la communauté de ces migrants prendra le relai.
On ne pourra qu’être surpris par la facilité de cette traversée malgré plusieurs contrôles. Ainsi revenue à davantage d’aisance financière, la jeune mère de famille dépensera peut-être un peu plus que ses moyens (et ses dettes accumulées) lui permettent. Faire plaisir à son fils, à l’occasion de son anniversaire. Se faire plaisir à elle aussi avec quelques achats d’impulsion. Et, de fil en aiguille, recommencer cette activité somme toute lucrative de passeur, plusieurs fois. Evidemment, même si elle conserve un peu le sentiment d’aider, de rendre service (une manière d’être dans le déni du délit qu’elle commet ?) elle prend des « parts de marché » à d’autres et s’attire donc des ennuis et des inimitiés dans ce milieu interlope.
Ainsi va le fil de conducteur de ce film, mi social, mi pratique délictuelle, mi humanisme (oups, ça fait trois moitiés ! oui bon, ça dépend de la taille des moitiés). La mise en scène est suffisamment bonne pour que le spectateur s’implique dans ces passages et prenne conscience de leur prix, pas seulement celui de ce qui est payé en billets de banque, mais également au sens figuré celui du risque de se faire prendre à tout moment. Surtout qu’il y aura parfois des aléas qui vont le tenir en haleine.