Avec ce film, Rohmer jette le masque : celui qui fut souvent traité de conservateur, voire de réactionnaire, et ce même par pas mal de ses admirateurs, fait carrément son "coming out" de royaliste fervant. En adaptant dans 'L'anglaise et le duc" les mémoires d'une écossaise royaliste, témoin de la Révolution Française et en particulier de la Terreur, en mettant en images cette vision forcément partiale de ces événements si importants de l'histoire de France, en allant même jusqu'à manipuler le texte original pour renforcer ce qu'il veut absolument prouver, il nous ouvre tout grand son jardin secret et il avoue la peur panique qu'il a du peuple, forcément paillard, violent et inculte. Bizarrement, on aimerait aimer ce qu'on voit sur l'écran, genre "je ne partage pas ses idées, mais j'ai suffisamment d'ouverture d'esprit pour faire fi de cette différence lorsqu'il s'agit d'apprécier un auteur", un peu ce qui se fait autour de Céline depuis plusieurs années. On pourrait même argumenter que ce que montre le film est finalement moins anti-Révolution que ce que Rohmer a propagé dans ses interviews à la sortie du film. On aimerait ... On pourrait ... Seulement voilà, il y a ce qu'on voit : il y a l'actrice principale, Lucy Russell, qui joue vraiment très mal, et on la voit quasiment en permanence ; il y a ce parti pris d'utiliser les techniques, nouvelles à l'époque, d'incrustation vidéo dans des tableaux pour toutes les scènes d'extérieur, ce qui nous ramène à certains films de la première moitié du siècle dernier, avec leurs décors qui, au mieux, nous arrachent aujourd'hui un sourire de nostalgie et le résultat s'avère très peu satisfaisant ; il y a un film très (trop) long et très bavard. Au bout du compte, il y a un film tout autant contestable sur la forme que sur le fond.