Audrey, Novinha, Précieuse, Faustine, Tamra, Allison et Caroline ont été placées par la protection suisse des mineurs dans un foyer proche de Genève. Elles forment une famille, une « mif » en verlan. Lora, la directrice, et les éducateurs spécialisés qui la secondent veillent jalousement sur elles et essaient de les aider à reconstruire leurs vies cabossées.
Des films sur des foyers de mineurs, on en a vu treize à la douzaine avec leurs adolescents perturbés mais au fond si touchants, avec leurs éducateurs dévoués, mais parfois faillibles : "La Tête haute", "States of Grace", "Hors normes"…
Il y a deux mois à peine sortait Placés sur le même thème, dont la bande-annonce ne m’avait pas donné envie de le voir. Je suis pourtant allé voir "La Mif" à cause des bonnes critiques qui le précédaient. Une semaine à peine après sa sortie, il n’était plus à l’affiche que d’une seule salle parisienne à des horaires impossibles.
Mon entêtement a porté ses fruits. J’ai réussi à voir "La Mif" avant qu’il ne disparaisse de la programmation. Et j’ai beaucoup aimé ce film réalisé par un ancien éducateur spécialisé, aux frontières du documentaire et de la fiction.
Je l’ai beaucoup aimé pour une raison évidente et assez prévisible : le portrait touchant qu’il dresse de ces adolescentes à fleur de peau et de ces adultes qui tentent tant bien que mal de les protéger.
Mais je l’ai beaucoup aimé pour une autre raison plus surprenante : sa construction très sophistiquée, kaléidoscopique, qui, autour d’une même trame narrative, s’intéresse successivement à chacune des pensionnaires. Chacune des jeunes filles devient à tour de rôle l’héroïne d’une histoire qui est à la fois commune et singulière. La narration diffractée n’en reste pas moins cohérente, prenant comme fil rouge le scandale causé par la relation sexuelle d’Audrey avec un jeune garçon de quatorze ans à peine.
Elle prend dans le dernier tiers du film un tour inattendu en se focalisant sur Lora, la directrice. "La Mif" opte alors pour un ton mélodramatique qu’on n’imaginait pas. Frédéric Baillif en a-t-il un peu trop rajouté ? peut-être. Mais cette débauche lui est vite pardonnée.