Polar dystopique
Pour ma part, c’est le 1er film du chinois de Hong-Kong, Soi Cheang, que je vois. Ce polar noir – très noir - tourné en 2021 arrive aujourd’hui sur nos écrans auréolé d’une nomination à Berlin et de 2 prix au festival international du polar de Reims. Eh bien, ces 118 minutes – qu’on ne voit pas passer -, méritent amplement ces titres de gloire. Dans les bas-fonds de Hong-Kong, un flic vétéran et son jeune supérieur doivent faire équipe pour arrêter un tueur qui s’attaque aux femmes, laissant leur main coupée pour seule signature. Quand toutes leurs pistes s’essoufflent, ils décident d’utiliser une jeune délinquante comme appât. C’est noir, très noir, d’une violence paroxystique, mais d’une virtuosité incroyable. Un choc !
Que ce film soit interdit aux moins de 16 ans est évidemment amplement justifié. Il s’agit de l’adaptation du roman The Wisdom Tooth de Lei Mi, de toute évidence inconnu chez nous. Le film nous montre deux Hong-Kong parallèles mais pratiquement hermétiques l’un à l’autre. La grande ville moderne – qu’on aperçoit que de manière très fugitive – et un inextricable réseau de ruelles qui semblent sortir de l’apocalypse, ce ne sont que montagnes de détritus, puanteur, amas de ferraille, et surtout la violence engendrée par tous les trafics et la misère. On est au royaume des marginaux. C’est là, et seulement là, que se noue l’intrigue entre les personnages principaux. Le noir et blanc est somptueux, les éclairages savants, l’histoire haletante et je le répète d’un niveau de violence que j’ai rarement vu atteint au cinéma. Âme sensible s’abstenir. Mais quel film !
La qualité du casting n’est pas pour rien dans la réussite de ce film dantesque.
La palme revient à l’actrice Yase Liu, qui nous emporte dans un rôle plus que physique. Une révélation pour sa 1ère tête d’affiche. Elle est entourée par les excellents Ka Tung Lam et Mason Lee. Citons aussi le japonais Iroyuki Ikoshi, dans la dernière partie dans ce thriller crépusculaire et étouffant qui nous laisse l’impression étrange d’avoir frôlé les replis les plus extrêmes de l’âme humaine et d’y avoir pris plaisir. Un cauchemar éveillé submergé de morbide et de putréfaction, une plongée dans un enfer visuel dont on en sort pas indemnes. A voir pour les amateurs de grand cinéma et… de sensations fortes. A côté, Seven c’est le club Dorothée.