Le Monde après nous est le premier long-métrage de Louda Ben Salah-Cazanas, qui a auparavant réalisé quatre courts, sélectionnés aux festivals de Clermont-Ferrand et de Namur. A l'origine, le réalisateur a planché sur l'écriture d'un film d'horreur, avant de revenir à quelque chose de plus personnel :
"D’où ces mots que prononce Labidi : « Quand j’écris, je le fais pour moi », qui est le dialogue clé du film. Ce nouveau projet décrivait ce que je vivais, à savoir la vie de jeunes à Paris qui sont sans argent et qui ne sont pas issus d’une classe qui leur permet de vivre dans cette ville et de réaliser leur art", confie-t-il.
Louda Ben Salah-Cazanas explique au sujet du titre du film, qui est aussi le titre du roman qu’écrit le personnage de Labidi : "Le monde passe après le « nous » du couple, des amis, de la famille ? Tout à fait. Je voulais un titre un peu « mégalo » pour le roman de Labidi, un titre un peu à la mode, qui évoque le climat, la planète, etc. Et, en même temps, comme je l’ai dit, faire un clin d’œil aux transclasses de Nicolas Mathieu."
Louda Ben Salah-Cazanas a choisi Aurélien Gabrielli (qu'il retrouve pour la troisième fois) pour interpréter Labidi. Le metteur en scène raconte : "Je me suis toujours projeté dans lui : il a un côté un peu froid, pince-sans rire, qui m’a toujours fasciné. Il a l’air d’observer les choses mais sans surréagir. Aurélien est aussi sur une ligne de crête, à la fois comique et un peu déprimé, un peu sombre, sans qu’on sache vraiment où il veut nous emmener."
"Je n’ai jamais imaginé un autre acteur en écrivant, parce que je savais qu’il empêcherait le personnage de tomber dans le cliché qui correspond au sujet, et aussi qu’il pouvait interpréter un scénario basé sur des sentiments plus que sur des actions."
Louda Ben Salah-Cazanas et le compositeur Jean-Charles Bastion ont associé des chansons existantes pour contraster avec le reste de la bande originale. Le réalisateur se rappelle : "Jean-Charles Bastion a eu l’idée du violoncelle. Il a créé des sons organiques, des défauts dans les cordes qui ajoutent du corps à la musique. Quant à Un homme heureux de William Sheller, que m’a suggérée ma femme, c’est une chanson qui fait pleurer, et je trouvais qu’il ne fallait pas s’en empêcher, je voulais qu’elle donne à la fin du film la nostalgie que je ressentais, ce moment où l’on visionne à rebours les expériences vécues."
Louda Ben Salah-Cazanas a pour habitude d'avoir la mise en scène en tête au moment de l'écriture. Mais pour Le Monde après nous, le cinéaste a procédé différemment : l’essentiel était fondé sur le jeu des acteurs. Il précise :
"Ce qui a rendu le film parfois un peu dur à réaliser, c’est que j’ai filmé des moments que j’ai réellement vécus. Quand je regardais le retour dans le combo, je me projetais dans ces séquences : je voyais un souvenir filmé. "
"Je regardais jouer Aurélien Gabrielli et ça arrivait que je me dise que ça ne reflétait pas le sentiment que j’avais de la situation vécue. Alors on abandonnait le théorique pour le vivant et je repensais donc constamment la mise en scène."
Louda Ben Salah-Cazanas voulait que l’image du film soit patinée et a pensé cette histoire comme un souvenir. Dans cette optique, les couleurs du bleu et du gris lui sont rapidement venues à l’esprit. "Même si en réalité, ce film est un remède contre la nostalgie. Je voulais réaliser un film rapide qui fasse vivre l’urgence dans laquelle se trouvent les personnages. Il fallait beaucoup de ruptures de tons pour créer des scènes qui décrivent des sentiments complexes. J’ai souhaité que le film se pose progressivement, pour qu’il se dilate à la mort du père, qui marque le passage à l’âge adulte de Labidi."