J'avais entendu le plus grand bien du premier film de Charlotte Le Bon, j'adore la BD dont il est adapté, j'aime les films sur l'adolescence... qu'est ce qui pouvait mal se passer ?
Et bien tout... absolument tout... c'est juste naze.
L'histoire est globalement la même que celle de la BD, on est en vacances, on a un pré-ado et une ado qui pourraient être frère et sœur, qui se mettent à se tourner autour de manière peu catholique. D'ailleurs tous les petits changements ne fonctionnent pas... Qui peut imaginer un seul instant mettre deux ados de 13 et 16 ans, de sexe différent, dans la même chambre ? Dans le film c'est normal, c'était prévu et personne ne se pose de question, alors que dans la BD, c'était imprévu, ce qui rend tout de suite la chose plus crédible. Mais la seule grosse différence plombe totalement le film. Charlotte Le Bon introduit un peu de surnaturel, le problème c'est que c'est tellement appuyé que forcément on sait que ça va avoir une importance et donc que la fin de la BD va être changée et comment elle va être changée. Subtilité zéro...
On est sur des rails, il n'y a pas de vie dans ce foutu film. Jamais à aucun moment elle ne laisse les personnages vivre leur vie et faire en sorte qu'on sente la tension monter entre eux au fur et à mesure. D'ailleurs elle échoue totalement à retranscrire cette tension naissance entre eux, parce que dans la BD, c'est du dessin, on peut faire ce qu'on veut, Vivès peut se permettre d'aller plus loin dans le dessin et d'être plus explicite... (on est d'accord que si tu montres au cinéma ce qu'il dessine ça ne peut pas fonctionner, ça sera juste malsain) Et donc se pose la question de comment tu peux faire ressentir ça, cette escalade érotique, sans jamais être explicite. Sauf que étant donné qu'il n'y a pas de vie, tous ces moments arrivent comme un cheveux dans la soupe et elle n'a pas spécialement d'idée de mise en scène pour les mettre en valeur.
Jamais Charlotte Le Bon ne va filmer leur relation se nouer à travers des choses un peu anodines, des conversations ou que sais-je... Non là on se retrouve avec uniquement les scènes clés pour l'intrigue, réduites à leur minimum et sans toute la vie qu'il y a autour. C'est pour ça que le film de Le Bon ne peut pas fonctionner, c'est pas vraiment crédible qu'une fille de 16 ans s'intéresse à un gars de 13 ans, il faut donc essayer de faire en sorte que le spectateur y croit à cette relation, créer un peu d'alchimie... Les montrer faire des trucs normaux... Les voir se rapprocher...
Mais l'autre souci c'est qu'aucun personnage n'a réellement de personnalité... On sait juste que le héros a peur de l'eau et euhhh, c'est tout... (D'ailleurs je ne comprends pas comment ce film a pu être défendu par des féministes pourtant très portées sur la question de la représentation des femmes et tout le tralala, parce que la fille est dans cette BD un bout de viande et rien de plus.)
En plus à aucun moment elle n'arrive à cerner ce que sont les angoisses adolescentes, la complexité de la relation avec le petit frère (qui est bien vite dégagé de l'intrigue). Il n'y a fondamentalement rien à se mettre sous la dent. Le film cavale à toute allure (et est sacrément chiant en passant) et ne laisse absolument pas le temps à tout ça de se développer, elle illustre juste. Elle veut montrer qu'ils s'aiment bien, alors elle les montre dans une scène digne de l'Attaque des Clones se faire des chatouilles dans les champs. C'est nul. C'est une scène purement fonctionnelle, elle n'a aucune émotion, tout ça est désincarné. Elle n'a aucune idée de cinéma, de comment par la mise en scène on peut faire passer une idée.
Bref, à part à de rares occasions (la scène où elle montre ses seins par exemple, mais rassurez-vous la morale est sauve) Le Bon se contente vraiment juste d'illustrer la BD avec des cadrages moins inspirés, un jeu d'acteur douteux et le tout en enlevant toute la finesse puisque tout a été haché pas du tout finement pour être le plus con possible.
Et donc je me pose vraiment des questions sur ceux qui ont aimé le film, l'ont-ils vraiment aimé pour des raisons cinématographiques, ou est-ce juste parce qu'ils auraient aimé avoir 13 ans et se faire draguer par une fille de 16 ans ? Parce que si jamais je ne peux que conseiller la BD, qui a l'avantage de ne pas être que ça, de l'amener correctement et de ne pas se complaire dans sa fin médiocre déjà vue mille fois.
Mais c'est là que c'est important de constater que la fidélité on s'en fout, la question c'est comment on adapte, comment on arrive à utiliser des procédés propres à son art pour raconter une histoire... Visiblement Le Bon ne s'est pas posée la question.