Pour adapter librement « Nana », roman d’Emile Zola, Jean Renoir finança entierement le film en vendant les tableaux que son père lui avait légués. La grande idée est d’opposer deux mondes : celui d’une Nana interprété par une Catherine Hessling gesticulante, pesante et hystérique, face à deux aristocrates, le Comte Muffat et le Comte de Vandeuvres, interprétés respectivement par le sobre acteur allemand Werner Krauss et le presque aussi retenu Jean Angelo. De même les décors passent de l’imposant hall de réception de l’hôtel particulier de Nana, et son escalier monumental, au salon minimaliste aux tentures assez laides. Cette ode à sa femme, ancien modèle de son père, qui devait la propulser au rang de star, est finalement plombé par l’interprétation plus qu’outrancière de cette dernière, parfois à la limité du regardable. Elle enlève toute crédibilité à la fascination qu’elle exerce sur les hommes en développant un érotisme proche d’un concert de klaxon d’embouteillage mélangé à un ventilateur en sur régime. Ainsi, le film devient un pensum, de deux heures et demi tout de même ! Dans ces conditions, il n’est pas étonnant, qu’en dépit de qualité certaines (Longchamp, le plan sur les mains des deux Comtes, la scène finale dans la version allongée de deux minutes, et quelques autres), le film fut moyennement acceuilli. Ayant coûté un million de francs (une fortune à l’époque), Renoir en sortit ruiné. Il disait avoir été influencé par « Folies de femmes » d’Erich Von Stroheim. La rigueur en moins. Heureusement, la suite de son eouvre confirma la phrase de Nietsche : « tout ce qui ne vous tue pas, vous rend plus fort ». Et Renoir devint très très fort.