Dalva a douze ans. Brutalement séparée de son père, elle est placée en foyer d'accueil. Elle y apprendra lentement à se reconstruire.
J'avais vu plusieurs fois la bande-annonce de "Dalva" sans y comprendre grand-chose. En découvrant cette pré-adolescente outrancièrement fardée, j'avais même pensé un temps que son héroïne était un petit garçon en train de vivre une transition de genre ! Or le sujet de "Dalva" n'est pas la transidentité, loin s'en faut, mais l'inceste.
La bande-annonce n'en dit rien. Elle a bien raison de n'en rien faire. Mais toutes les critiques l'évoquent. Le film, dès sa toute première scène, le laisse comprendre.
Un tel sujet est évidemment tétanisant. "Les Chatouilles" l'avait pris à bras-le-corps en 2018 avec une terrible efficacité. On se souvient qu'il s'agissait de l'adaptation d'un seule-en-scène construit sur la base de flashbacks entre le passé traumatisant de son héroïne et sa lente reconstruction grâce à la cure psychanalytique qu'elle avait entreprise.
Ici, c'est moins de l'inceste proprement dit qu'il est question, qui demeure hors champ, dans un passé dont on ne verra et dont on ne saura rien - l'action commence le jour de l'arrestation du père de Dalva - que du chemin que parcourra Dalva pour retrouver l'enfance qui lui a été volée.
Le vrai sujet du film est paradoxal voire choquant : il est dans le refus initial de l'enfant d'admettre la culpabilité de son père, voire son entêtement obstiné à clamer son innocence.
Jacques - c'est le nom de ce père qu'elle n'appelle jamais "papa" - avait transformé sa petite fille en poupée hypersexuée, maquillée, coiffée, vêtue comme une femme mature. On imagine en frémissant ce qui se cache derrière ce fantasme. Mais Dalva, loin de vivre l'arrestation de son père comme une délivrance, la vit comme une séparation intolérable.
Elle exige de conserver ses vêtements, son maquillage, son chignon sophistiqué. Elle demande à revoir son père, placé sous écrou à Reims.
Ainsi posé le film s'annonce palpitant. Mais l'exploitation qu'il fait de ce postulat de base reste assez plat. Comme on l'a déjà vu mille fois, dans tant de films plus ou moins similaires ("La Mif", "Mon frère", "Conséquences", "La Tête haute", "States of Grace", "Fish Tank", "Dog Pound"...), "Dalva" filme la vie dans un foyer d'accueil de l'ASE - ce qu'on a cessé depuis longtemps d'appeler "l'Assistance". Là, au contact d'éducateurs bienveillants (Alexis Manenti, César du meilleur espoir masculin pour "Les Misérables", Marie Denarnaud...) et d'une camarade de chambre aussi cabossée qu'elle (Fanta Guirassy à suivre), elle se reconstruira.
La jeune Zelda Samson est impressionnante dans le rôle titre. Elle joue à la perfection un mélange ambigu de féminité aguicheuse et d'enfance innocente. Une seule reproche : on la voit trop vite basculer du premier registre vers le second.