Les corps blessés
3 ans après son formidable Papicha, Mounia Meddour situer son nouveau film encore une fois en Algérie. La continuité est certaine, et pas seulement à cause du cadre. Le sujet de la femme dans les pays du Maghreb est, ici, subtilement traité, à travers une mise en scène gracieuse et solaire. Alger. Houria est une jeune et talentueuse danseuse. Femme de ménage le jour, elle participe à des paris clandestins la nuit. Mais un soir où elle a gagné gros, elle est violemment agressée par Ali et se retrouve à l’hôpital. Ses rêves de carrière de ballerine s’envolent. Elle doit alors accepter et aimer son nouveau corps. Entourée d’une communauté de femmes, Houria va retrouver un sens à sa vie en inscrivant la danse dans la reconstruction et sublimation des corps blessés… 98 minutes de toute beauté qui nous propose un chemin vers la résignation et la résilience à la manière de Cédric Klapisch dans En Corps.
Même si le film accuse quelques baisses de régime dans sa partie centrale, on se souvient pour longtemps de la scène d’ouverture, une danse sans musique, au rythme du vent, et, beaucoup plus loin, une autre danse, collective celle-là, évanescente et comme hors du temps, où la troupe toute de blanc vêtue, fait penser à un tableau antique. Rien que ces deux moments de grâce pure, il faut voir ce film, un film de femmes avec des femmes mais qui touchera les hommes par ce constat au plus proche d'une réalité algérienne méconnue, honnête et sensible. Rappelons que le titre signifie « liberté » en arabe. Lourd de sens.
Lyna Khoudri, une fois de plus impeccable, porte le film de bout en bout. Certains déploreront qu’on la voit partout depuis un peu plus d’un an – Nos Frangins, Novembre, La Place d’une autre, Haute couture, French Dispatch, Hors normes, Papicha, et bientôt dans Les Trois Mousquetaires -, mais cela vaut de se poser la question : n’est-ce pas tout simplement dû à son talent ? Elle est fort bien entourée par Amira Hilda Douaouda, Rachida Brakni et Nadia Kaci. Du beau cinéma.