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    Le Chemin du bonheur
    Anecdotes, potins, actus, voire secrets inavouables autour de "Le Chemin du bonheur" et de son tournage !

    Une longue histoire...

    L'histoire du film trouve sa source au début des années 1990, lorsqu'un certain Henri Roanne a proposé à Nicolas Steil de prendre les commandes d’une partie du Programme MEDIA de la Commission Européenne, une fonction qui consiste à trouver et mettre en place des mesures d’accompagnement pour aider les producteurs à mieux financer et vendre leurs films :

    "Dans le métier, tout le monde l’appelle alors 'Papa Média' parce que, dans les années 1990, après avoir quitté le métier de critique de cinéma, il avait été avec Holde Lhoest à l’origine de ce programme ambitieux de soutien européen. Grâce à lui, je me retrouve à Bruxelles, à la tête d’un bureau d’une trentaine de personnes", se rappelle le cinéaste, en poursuivant :

    "On a des antennes dans 18 pays et on 'fait' environ une douzaine de marchés du film par an, dont celui de Cannes, c’est passionnant. Au fil des mois, Henri devient, non seulement un ami, mais mon 'papa de cinéma'. Au cours des longues soirées que nous passons ensemble, il revient souvent sur son histoire de petit enfant juif autrichien pendant la guerre."

    "Pour éviter qu’il ne soit pris par la Gestapo, sa mère l’avait mis, à Vienne, dans un train d’enfants, un 'Kindertransport' à destination de Bruxelles. Le petit garçon de six ans qu’il était alors, n’avait pas compris que si sa mère se séparait ainsi de lui, c’était pour le sauver du pire... Près de cinquante ans après, à chaque fois qu’Henri évoque devant moi cet évènement, c’est encore avec une certaine colère."

    "Il n’a toujours pas entièrement compris le sacrifice de sa mère... Les années passent et Henri quitte la vie active. Sa retraite se solde d’abord pour lui par une profonde dépression qui dure environ trois ans ; trois longues années au cours desquelles il ne cessera de ressasser son passé. C’est l’écriture qui va le sauver. Il commence par écrire un premier livre à partir d’un film qu’il avait réalisé sur Tintin."

    "Devant sa réussite, son éditeur lui demande, à lui qui est un peu la mémoire belge du cinéma, d’écrire ses souvenirs. Il refuse mais accepte d’écrire quelque chose sur le cinéma : il publie en 2013 'Le Cinéma de Saül Birnbaum', une fiction finalement assez autobiographique - en tous cas pour ce qui concerne l’enfance de Saül."

    "La genèse du film, qui s’appellera finalement Le Chemin du bonheur, débute lorsqu’il me donne son livre à lire car j’y vois tout de suite matière à une adaptation pour le grand écran. Quand je le lui dis, il commence par dire non, par peur, dit-il qu’il n’y ait pas la matière d’un film. En mon for intérieur, je crois surtout qu’il a tiré un trait sur son passé et qu’il n’a pas envie d’y replonger."

    "Mais je ne le lâche pas, car cette histoire m’a profondément bouleversé. Un jour, je présente à Henri Michel Fessler, un scénariste très connu, et qui est par ailleurs un alsacien d’origine juive dont la famille s’est convertie au catholicisme pendant la guerre pour les raisons que l’on sait... On fait un dîner tous les trois et on commence à travailler. L’aventure va durer sept ans."

    Les choses se concrétisent

    Le travail ne s’est ensuite pas fait en continu. Michel Fessler et Henri Roanne ont écrit plusieurs versions du scénario. Dans chacune d’elles, par fidélité au roman, ils situaient le Delicatessen de Saül à New York. Or, Nicolas Steil n'arrivait pas à trouver le budget pour aller y tourner. Il se souvient :

    "Un jour, j’ai l’occasion d’aller visiter les studios Nu Boyanof en Bulgarie. Soderbergh y avait tourné sa série The Knick, et les rues de New York reconstituées pour cette série étaient toujours là. Dans un premier temps je trouve ça formidable et puis je comprends qu’en fait, on se fourvoie avec cette idée de New York, et que ce serait une bien meilleure idée d’implanter le 'Deli' à Bruxelles, puisque c’est la ville où Henri était descendu de son Kindertransport et où il était finalement resté."

    "Et que c’est la ville où j’ai grandi et découvert le cinéma. Aussitôt rentré à Bruxelles, je lui fais part de ma proposition... Qu’il accepte. Mais remodeler le scénario a encore pris plus d’un an. Quand on s’est mis d’accord sur sa version définitive, j’ai enfin pu réfléchir au casting et mettre sur pied le financement et le tournage."

    Devoir de conscience

    Le premier film de Nicolas Steil, Réfractaire, avait déjà pour cadre la Deuxième Guerre mondiale. Par ailleurs, le réalisateur a produit plusieurs séries, dont 18, le fracas des utopies, qui s’interroge sur comment après le "plus jamais ça" de la Première Guerre mondiale, on a accouché de ce monstre que fut la seconde avec, entre autres, les millions de morts innocents de la Shoah. Une autre qui s’intitule 41, le partage du monde et donne à comprendre comment et pourquoi le monde a évolué depuis Yalta. Le cinéaste confie :

    "En tant que citoyen, je me sens très impliqué non seulement dans les combats à mener contre la dictature mais aussi pour l’éducation des enfants. C‘est à eux que s’adressent les messages de tolérance, de respect et de démocratie que je mets dans mes films ou téléfilms, à eux que j’essaie d’expliquer qu’il est le plus souvent possible de s’en sortir par le haut, à condition d’accepter de s’interroger sans complaisance et de travailler sur ses cicatrices mémorielles. Le devoir de conscience est une notion qui me porte et m’obsède."

    Références de prestige

    Côté références, Nicolas Steil avait en tête Le Dernier métro de François TruffautLa Vie est belle de Roberto Bénigni et, dans une moindre mesure, le cinéma de Martin Scorsese et de Stanley Kubrick. Le metteur en scène précise :

    "Bizarrement, à la veille du début du tournage, j’avais regardé The Revenant d’Alejandro Gonzãles Iñárritu, avec Leonardo diCaprio. Il était donc tout frais dans ma mémoire quand je suis allé pour la première fois sur le plateau. Je ne sais pas dans quelle mesure ce petit chef d’œuvre a influé sur ma façon de tourner. Mais je suis sûr qu’en cherchant bien, je parviendrais à trouver (rire)."

    Qui pour Saül ?

    Simon Abkarian, un grand habitué des rôles de gangsters, incarne Saül adulte. C'est surtout son parcours théâtral qui a motivé Nicolas Steil à le choisir : "Simon est non seulement un artiste complet (il écrit, joue et met en scène avec un talent qui lui a valu, en 2020, de rafler 3 Molière pour le seul Electre des bas-fonds. Du jamais vu dans la profession !), mais il est aussi un être d’une humanité rare."

    "En yiddish, les gens comme lui, on les appelle les 'Mensches'. Simon n’est pas juif, mais il est arménien. S’il n’a pas connu la Shoah, il sait ce qu’est un génocide. Pour moi il était celui qui allait le mieux comprendre et interpréter Saül. D’autant qu’en plus de pouvoir jouer toutes les nuances d’un rôle, Simon sait 'faire le show', c’est-à-dire animer, chanter et danser", explique le réalisateur.

    Présent pendant le tournage

    Henri Roanne a été présent tous les jours de tournage et a revécu les scènes avec un grand stoïcisme et beaucoup d’émotion. Nicolas Steil se rappelle : "Mais quand on a tourné celle où sa mère le met dans le train, il a eu comme un électrochoc. Il m’a avoué avoir enfin entièrement intégré à ce moment-là - à 90 ans ! - combien d’amour et d’abnégation il avait fallu à sa mère pour le confier à quelqu’un d’autre."

    "L’avènement, sur mon plateau, de la résilience d’Henri vis à vis du traumatisme d’abandon dont il souffrait depuis son enfance a été tellement important pour moi que j’ai décidé de changer le titre de mon film. Il devait s’appeler, comme le livre, Le Cinéma de Saül Birnbaüm. Je l’ai intitulé Le Chemin du bonheur."

    Le reste du casting

    Pour le personnage de Hannah, Nicolas Steil cherchait une actrice blonde hitchcockienne, qui soit en même temps forte et fragile, mystérieuse et franche, raffinée et subtile. Il a ainsi choisi Pascale Arbillot. Le metteur en scène confie au sujet du reste du casting principal du Chemin du bonheur :

    "J’ai été également très touché que Michel Vuillermoz accepte d’être de la distribution. C’est quelqu’un d’extrêmement drôle et fin dans ses interprétations. Nous avions déjeuné il y a cinq ans pour parler de ce film. Quand je l’ai rappelé, il m’a dit : 'Eh bien, tu en auras mis du temps !'."

    "Et tout c'est fait simplement. Comme avec Eric Caravaca, qui est lui aussi non seulement un immense comédien mais un très grand photographe. Il a fait des photos magnifiques du tournage. La distribution féminine m’a également enchanté. De Brigitte Fossey à Helena Noguerra en passant par Mathilda May."

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