Depuis près de 50 ans, le réalisateur chilien Patricio Guzmán nous raconte son pays sur grand écran. Cette fois ci, c'est le récent mouvement populaire qui a embrasé le pays à partir d'octobre 1979 qui est le sujet de son film. Un mouvement dont le détonateur a été l'augmentation du ticket de métro de 30 pesos, soit l'équivalent de 3 centimes d'euro. Un mouvement qui a pris une grande ampleur, les sujets de mécontentement étant nombreux dans ce pays particulièrement inégalitaire, où les études sont chères, où la santé est chère, où les retraites sont faibles, etc. Un mouvement qui a généré une manifestation réunissant 1 million 200 000 manifestants dans les rues et les places de Santiago du Chili. Un mouvement que le gouvernement de droite du milliardaire Sebastián Piñera a choisi de combattre en instaurant l'état d'urgence et en envoyant l'armée et ses chars dans les rues de la capitale. Un mouvement dont de nombreux participants ont perdu un oeil, voire plus encore, mais qui a réussi à obtenir que soit organisée une assemblée constituante chargée de rédiger une nouvelle constitution qui viendrait remplacer la constitution adoptée en 1980 sous la dictature de Pinochet. Une période qui s'est terminée par l'élection à la tête de l'état d'un représentant de la gauche chilienne, Gabriel Boric, un ancien leader étudiant. Le film s'arrête sur cette victoire, mais il est bon de savoir que, quelques mois après, en septembre dernier, la nouvelle constitution a été rejetée : 62 % contre, 38 % pour alors que, lors du référendum du 25 octobre 2020, 78 % des votants s'étaient prononcé pour l'écriture d'une nouvelle constitution. Comprenne qui pourra ! Tout ce qui s'est passé entre octobre 2019 et l'élection de Boric est filmé par Patricio Guzmán au travers du ressenti des femmes chiliennes qui sont, pour lui, les premières touchées par les injustices. On trouve donc un grand intérêt à voir ce film et à entendre ce qui y est dit, même si on se sent obligé de trouver peu satisfaisante la façon dont il est réalisé : il suffit, pour en être convaincu, de le comparer à "Femmes d'Argentine" de Juan Solanas, film beaucoup plus tonique, tourné il y a 3 ans de l'autre côté de la Cordillère des Andes sur la lutte des femmes d'Argentine pour le droit à l'avortement.