Avec Feast (2021), le réalisateur Tim Leyendekker revient sur un sordide fait divers survenu à Groningue aux Pays-Bas en 2007. Trois homosexuels ont été condamnés pour avoir drogués, violés et injectés à plusieurs victimes leur propre sang contaminé par le VIH. Les victimes avaient pris rendez-vous sur internet pour des orgies homosexuelles privées, elles ne s’attendaient pas en retour, en ressortir drogués et atteintes du SIDA.
Oscillant entre le documentaire et la fiction, le plasticien néerlandais Tim Leyendekker nous prend au dépourvu car son film n’est clairement pas le produit auquel on s’attendait. On se retrouve devant une œuvre expérimentale qui a clairement le cul entre deux chaises, oscillant entre plusieurs genres cinématographiques.
Tellement borderline que le film en aura laissé plus d’un sur le carreau. Pendant toute la durée de la projection, je me suis amusé (ou plutôt, passer le temps) à comptabiliser tous les spectateurs qui quittaient la salle. Nous étions une petite quarantaine, au bout de 30min de projection, déjà 10 spectateurs se sont fait la belle. Au bout des 85 minutes que compte le film, ce n’est pas moins de la moitié de la salle (!) qui est partie.
Et cela n’a rien de très surprenant puisqu’à aucun moment le réalisateur ne parvient à nous immerger au cœur de son film. Ce dernier est découpé en 6 segments, tous plus variés les uns que les autres, à commencer par une étonnante scène d’ouverture très captivante (un plan séquence de 10min où l’on se retrouve face à une étonnante énumération d’objets tels que des godemichets, des capotes, 750ml de GHB, 2kg d'ecstasy ou encore des lettres, … sans nul doute appartenant aux coupables). Tout au long du film, on ne sait jamais si l’on a affaire à de la fiction ou de la réalité, le réalisateur brouille les pistes, on ne distingue jamais la frontière de la reconstitution, même si parfois, sur certains segments, il est facile de le deviner. Des segments qui laissent parfois à désirer comme ces échanges philosophiques (véritable branlette intellectuelle et conceptuelle) ou des acteurs échangent devant un miroir sans tain pendant 30 longues minutes. Par la suite, on assiste à des échanges entre deux protagonistes dont on ne saura rien d'eux et où les images indescriptibles ne veulent rien dire. Ça n’est qu’au bout d’un quart d'heure que l’on finit par comprendre que l’on est face à l’un des coupables. Segment suivant, on assiste à l’entretien filmé d’un des complices à son domicile, puis, on se retrouve chez une scientifique qui analyse les effets du poison sur des fleurs, le segment d’après, on se retrouve au commissariat. Chacun des segments prenant soin d’alterner fiction et documentaire, on finit par être totalement perdu, incapable de faire la distinction entre le vrai du faux.
C’est d’autant plus regrettable que, vu l’histoire, cela aurait pu faire un excellent documentaire si le réalisateur ne s’était pas perdu dans des circonvolutions inutiles et une mise en scène aussi surprenante que déroutante. Entre expérimental, documentaire et reconstitution, Tim Leyendekker déroute et finit par nous perdre sans parvenir à nous retenir.
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