Les Folies fermières s'inspire d'une histoire vraie, que Jean-Pierre Améris a découverte en janvier 2018 lorsqu'il est tombé sur un reportage consacré à David Caumette aux actualités régionales de France 3. Le metteur en scène se rappelle : "Son récit a résonné en moi comme une évidence : j’allais en faire un film. Trois semaines plus tard, ma productrice, Sophie Révil, et moi nous rendions dans le Tarn pour rencontrer David."
David Caumette est parti du constat suivant : depuis 2010, vingt-sept fermes disparaissent chaque jour en France dont un tiers en élevage. Plus de 350 agriculteurs se suicident chaque année, soit presque un agriculteur chaque jour. Il développe :
"Cette dure réalité ne nous a pas épargnée sur ma commune de Garrigues dans le Tarn. Dans les années 1950, plus de la moitié de ses deux-cent cinquante habitants vivaient des métiers de l’agriculture. Aujourd’hui, la commune compte toujours autant d’administrés mais il ne reste qu’une dizaine d’agriculteurs."
"Je suis le SEUL et DERNIER éleveur du village. En 2007, la ferme familiale étant la seule à résister encore, j’ai fait le choix de démissionner de mon poste de directeur d’exploitation en lycée agricole, pour reprendre ce seul et dernier élevage avant qu’il ne disparaisse à son tour."
"Ce challenge fou a surpris beaucoup de monde : ma famille, qui s’est opposée à mon installation en tant que jeune agriculteur ; les anciens de la commune, qui m’appelaient le fou du village ; les organismes agricoles qui ne croyaient pas du tout en ma réussite."
"Persuadé que « les Folies sont les seules choses qu’on ne regrettent jamais » j’ai alors pensé que plus il y aurait de fous dans mon projet, plus on aurait des chances de sauver cette exploitation et de démontrer ainsi par des actes, que si on laissait les agriculteurs se diversifier et innover en France, on pourrait alors les sauver, eux et leurs fermes."
"C’est en posant ce diagnostic que les Folies Fermières sont nées car pour moi, seuls les fous sont capables d’ouvrir les portes qu‘emprunteront ensuite les sages !"
Jean-Pierre Améris a été touché par David Caumette et sa façon de répondre à la situation difficile dans laquelle se trouvait son exploitation par une idée aussi fantaisiste que celle de la création d’un cabaret. Il précise :
"Il a une idée fixe, beaucoup d’obstacles à surmonter et n’en démord pas. C’était un vrai personnage de cinéma ; un opiniâtre comme je les adore. Les moments d’accablement qu’il a traversés m’ont beaucoup ému."
"À force d’affronter des tempêtes, il m’a confié avoir sérieusement pensé un jour mettre fin à ses jours. Il faut savoir que, à cause des difficultés qu’ils traversent, de l’isolement et de la fatigue, un agriculteur français se suicide chaque jour."
Alban Ivanov est très présent en 2022, avec quatre films supplémentaires en plus des Folies fermières : Les Gagnants, Les SEGPA, Le Médecin imaginaire et La Traversée. Il explique pourquoi il a voulu prendre part au long métrage de Jean-Pierre Améris :
"J’ai adoré la folie du bonhomme auquel le désespoir donne les idées les plus dingues. Il sort des clous, on le prend pour un cinglé, mais ça marche et, du coup, le type devient génial. Le message est formidable : il faut oser être différent…"
En mai 2019, David Caumette a consacré un livre à son expérience. Mais le film ne s’en inspire pas, comme l'explique Jean-Pierre Améris : "Avec Jean-Luc Gaget, mon coscénariste, nous avions démarré l’écriture bien avant, rejoints par la suite par les scénaristes Marion Michau et Murielle Magellan qui y ont apporté leur touche de légèreté. L’écriture a été un long processus qui nous a pris plus d’un an et demi. Elle s’est essentiellement basée sur le récit que m’avait fait David lors de notre rencontre."
Durant la phase d'écriture, Jean-Pierre Améris a rencontré beaucoup d’autres agriculteurs : "Les Folies fermières ne pouvait pas être la lubie d’un Lyonnais parisien réalisateur. Je n’ai pas d’origine paysanne, je me suis donc immergé, comme toute l’équipe, dans la réalité du milieu paysan. Ces gens devaient pouvoir se reconnaître. J’ai passé du temps avec eux et découvert leur monde. C’est ce que j’aime dans mon métier : on ouvre des portes, on apprend…"
Jean-Pierre Améris a tourné le film en Auvergne, dans le Cantal, plutôt que dans le Tarn (où l'histoire s'est réellement passée). Le cinéaste explique pour quelle raison : "Moi, je viens de Lyon, tout près de l’Auvergne, et j’avais depuis longtemps envie de tourner dans le Cantal, avec ses paysages sauvages que j’adore. Avec mon assistant, nous avons longtemps cherché la ferme où tourner."
"À l’instant où j’ai vu celle du Couderc (dont nous avons gardé le nom dans le film), j’ai su que c’était elle. Il y avait tout : une grange magnifique, l’étage pour David, le champ pour le spectacle de fin, les vaches… Un coup de foudre !"
Jean-Pierre Améris a opté pour une réalisation faisant la part belle aux plans larges : "Beaucoup de plans larges… À la fois inscrire les personnages dans le paysage et montrer tout le groupe agissant ensemble."
Alban Ivanov et Sabrina Ouazani avaient déjà joué ensemble dans la comédie footballistique Une belle équipe. De même, l'actrice retrouve le réalisateur Jean-Pierre Améris qui l'avait dirigée dans le téléfilm Illettré.
Jean-Pierre Améris avait pour référence principale Les Feux du music-hall, le premier long-métrage de Fellini, qu'il définit comme étant à la fois pathétique et bouleversant. Il confie : "J’ai toujours eu une passion pour les gens du music-hall et du cabaret, cette force qu’ils ont à se produire même dans un endroit minable, même devant un public clairsemé."
"À mon échelle, j’ai vécu cela en présentant parfois mes films devant des salles quasi vides. J’y suis allé, j’ai débattu avec la poignée de gens présents, et ai toujours réussi à y trouver de la joie. Ce n’est pas la réussite qui compte, c’est le faire. On fait la route et on joue. Les Folies fermières est aussi un hommage à tous ces artistes anonymes qui arpentent les routes."
A noter la présence de Moussa Maaskri, comédien marseillais ultra-habitué à jouer les gangsters comme ses prestations dans Requiem, Pour elle, Comme les 5 doigts de la main, L'Immortel, Corniche Kennedy ou encore Carbone en témoignent. Dans Les Folies fermières, il campe un ouvrier agricole qui nourrit une passion pour la mère de David (Michèle Bernier).