Repéré grâce au fan-film « Portal : no escape », Dan Trachtenberg est rapidement passé au long-métrage, dans cette même dimension, où le décor restreint les mouvements de ses héros. « 10 Cloverfield Lane » est assurément une très bonne surprise, qui l’a conduit à piloter un des projets cachés de la Fox, avant le rachat par la firme aux grandes oreilles. L’objectif du cinéaste est alors modeste, sachant l’appétit survitaminé d’un studio qui peut en redemander plus. Sa volonté penche toutefois sur les vertus instaurées par McTiernan, sans pour autant l’affronter sur son territoire et c’est là qu’est l’astuce. Les nombreuses suites militarisées à outrances, en passant par une confrontation avec d’autres aliens moins sympathiques, la mythologie du Predator a fini par tirer toutes ses cartouches.
Pourquoi se contenter des mêmes archétypes, alors que cette délocalisation temporelle permet d’explorer un autre type de vertige ? Moins mesuré que l’affrontement porté par Schwarzenegger, le récit nous catapulte aux XVIIIe siècle, au sein d’une tribu Comanche particulièrement engagé dans l’honneur. Il en va de celui des hommes, chasseurs et guerriers de par leur statut autoproclamé, tandis que Naru (Amber Midthunder) et les autres femmes sont recalées à des tâches domestiques. Sans tomber dans le piège d’une masculinité trop têtue, l’intrigue nous laisse du côté de cette jeune pisteuse, qui rêve également de partager les armes avec ses aînés. Le pacte qu’elle se fait à elle-même en ouverture prouve que l’on avancera logiquement vers un survival à peu près assumé, car ce qui compte réellement, c’est d’arriver au duel final avec un antagoniste, dont le culte est d’imposer sa suprématie de chasseur.
Avec « The Revenant » en tête et quelques répliques bien connues du milieu, Trachtenberg confronte son périple à un genre qu’il aime voir grandir. Pour cela, il ne s’enlise pas dans la répétition, changeant constamment de décor et multipliant les angles de vue, afin de styliser cette nature qui masque ses griffes acérées. S’il prend un peu trop son temps à exposer les problématiques de son héroïne en première partie, il semble se livrer corps et âme dans une seconde bien plus excitante, où les exécutions restent assez inventives graphiquement et laissent une part d’ombre en arrière-plan afin de rappeler la menace qui plane et dont le vidage nous est familier malgré tout. On réinvente donc un peu l’inventaire du Predator, en replongeant dans le côté bestial qui dynamise le récit initiatique. Impossible de perdre une miette de cette double traque, passé ce cap et rien que pour la prouesse d’une telle générosité, un visionnage en salle aurait été amplement mérité.
« Prey » n’est pas sans défaut, mais ils ne les cumulent pas aussi maladroitement que la plupart de superproductions, qui distillent les gags aléatoirement ou qui désamorcent la tension dans le même mouvement. Ici, rien de plus sérieux qu’un projet minimaliste, mais non sans saveur et encore moins sans identité. Une série B maligne dans sa conception et dans son aura épique singulière, où une femme aura le droit de prétendre aux mêmes activités ludiques que ses pairs, dans le seul but de prouver sa vaillance et surtout son efficacité. Sans pour autant s’inscrire dans la continuité du prequel et armé de son meilleur tomahawk, le film capitalise tout sur une honnêteté rare, revalorisant ainsi les chances d’extension pour une saga qui a longtemps piétiné ses chances de résurrection.