Le fond politique de Nicolas Pariser (Le Grand jeu, Alice et le maire) pouvait lui accorder un cran d’avance sur la trame d’espionnage qu’il a choisi. Ce dernier se prête à présent au jeu de la comédie truculente, qu’il cherche désespérément à faire cohabiter, au détour de situations extravagantes, tout droit sorties d’une bande dessinée ou bien à la portée d’un duo comique fort séduisant sur le papier. Cette singularité jouait pourtant en sa faveur et présageait une escapade insolite. Malheureusement, le cinéaste semble uniquement s’autoriser le pastichage du polar et de l’espionnage, quelque part entre Hitchcock et Hergé, deux mondes à part qui servent davantage la citation que le récit en lui-même.
On ouvre sur une pièce, une fiction à proprement parler, où les mots percutent aussi sauvagement qu’un poison, dont un comédien fera les frais, en conjurant la chance de son ami Martin (Vincent Lacoste). Puis entre un kidnapping et une rencontre inattendue chez un libraire, le jeune homme, qu’on aura vite fait d’emprisonner dans un corps épuisé, va faire la rencontre de Claire (Sandrine Kiberlain), une dessinatrice en pleine crise familiale. Et alors que l’on hurle au complot sous tous les toits, ces deux solitaires devront ainsi conjuguer leur force et leur lucidité, afin de résoudre une affaire qui les dépasse. On ne boudera pas notre plaisir quand il s’agira de se laisser balader par leur complicité, très aléatoire, où l’on croirait lire dans des cases, avec une action, souvent commentée puis démontrée. Malgré tout, c’est là où les ennuis commencent.
Sans savoir sur quel pied danser, la tension efface le timbre comique et à son tour, l’humour écrase la vigueur dramatique. Ce processus de désamorçage permanent nous fait décrocher, installant un faux-rythme au passage, tout en traînant une flopée d’incohérences, en étant conscient ou non de sa fibre avant tout littéraire. L’image ne sert donc plus à traduire l’émotion, mais bien des actions et c’est ce que Pariser oublie de mettre en scène au passage, préférant s’attarder sur le look de son héros un peu gauche et de son héroïne plutôt perspicace. La dynamique des interprètes ajoute également un décalage dans ce voyage aux quatre coins de l’Europe. Leur éducation sentimentale ne constitue qu’une sous-couche supplémentaire à un scénario trop bancale pour qu’on y trouve un soupçon de plaisir ou de pertinence. Quant au vilain de l’histoire, Hartz (Rüdiger Vogler), on regrette amèrement du peu de temps qu’on lui consacre, en dehors de la lunette de tir des héros burlesques.
À force de trop en vouloir, le film en dit trop sur ce qu’il désire être et passe à côté d’une comédie, dans un premier temps ludique, avant de la mixer dans un exercice de style épuisant. En somme, « Le Parfum Vert » ne libère pas plus de saveurs que d’odeurs et inquiète sur sa direction, comme en témoigne de longs monologues qui ne savent pas comment inclure l’antisémitisme ou la représentation d’une jeunesse pressée, dans le même mouvement de l’intrigue. Sans surprises, les personnages courent et défilent, sans éclat et sans recul.