Décidément, même la vie des dinosaures aura été chamboulée par la pandémie de Covid-19 et ses périodes de confinement ! Rassurez-vous, on ne parle pas de vélociraptors masqués ou de T-Rex obligés d'avaler une gamelle de vaccins Pfizer mais bien du tournage du prochain film de la franchise "Jurassic World" qui, l'année dernière, a subi de plein fouet les conséquences du coronavirus avec une production freinée plusieurs fois par le test positif de certains de ses membres, obligeant l'équipe et les acteurs à vivre plus que de raison en huis-clos dans un hôtel luxueux du Royaume-Uni. Apparemment, ce qui est ressorti de cette expérience de tournage pas comme les autres a donné lieu a des anecdotes savoureuses qu'une personne bien informée a eu la bonne idée de révéler à Leslie Mann, actrice et épouse de Judd Apatow. En résulte aujourd'hui "The Bubble", nouveau film réalisé et coécrit par ce grand nom incontournable la comédie US et qui bien sûr s'inspire plus ou moins de ces événements en prenant pour cadre le tournage contrarié d'un blockbuster imaginaire "Cliff Beasts 6" !
En suivant la star Carole Cobb qui n'a plus d'autre choix que de rempiler dans cette franchise fictive après un énorme four (ceci dit, "Jerusalem Rising" a l'air de valoir le coup d'oeil, haha !), notre introduction dans la bulle de ce grand barnum hollywoodien expatrié en Angleterre nous colle très souvent un sourire hilare au visage. Entre des assistants de stars assimilés à des dresseurs d'animaux, la présentation des différents egos démesurés de ses acteurs et la complète paranoïa ambiante des représentants du studio à l'égard de la Covid, Apatow tourne parfaitement en dérision les conditions draconiennes de ce contexte pour en faire ressortir les vicissitudes absurdes du monde hollywoodien. Certes, au fond, rien de bien neuf dans la plupart des archétypes utilisés ici et que l'on retrouve habituellement dans ce genre de farce moqueuse du cinéma US mais, aidé de cette situation si particulière (et encore si proche) que nous avons tous connue à notre échelle, le film réussit à en fournir des variations vraiment ancrées dans notre époque, avec un lot de préoccupations modernes aussi drôles que superficielles pour fournir du grain à moudre au regard mordant de Apatow.
Ainsi, en compagnie d'une star paumée (Karen Gillan), d'une influence de Tik-Tok faisant ses premiers pas au cinéma (Iris Apatow), d'un acteur se rêvant gourou (Keegan Michael-Kee), d'un autre caractériel (Pedro Pascal), d'un vieux couple hollywoodien déphasé (Leslie Mann & David Duchovny), d'un réalisateur venu de Sundance pour son premier blockbuster (Fred Armisen) ou encore de toute une équipe déboussolée par la moindre suspicion du virus, Apatow croque avec jubilation les travers d'un monde qu'il ne connaît que trop bien avec des saynètes d'un quotidien grotesque allant évidemment bien au-delà de notre condition de simples mortels et des méthodes de tournage hilarantes dans lesquelles tous se retrouvent bientôt pris au piège (mention spéciale au tournage proprement dit des scènes sur fonds verts).
Mais les bulles les plus courtes sont les meilleures et, au fur et à mesure que la situation devient anxiogène pour ses interprètes (disons au bout d'une heure de long-métrage en gros), "The Bubble" se transforme malheureusement en une bulle d'ennui répétitive.
Pour bien vous rendre compte de l'impression que dégage le film à ce moment , imaginez qu'un ami vous raconte une très bonne blague au cours d'une soirée, vous provoquant un énorme fou rire, et que, ensuite, celui-ci se mette à la répéter en boucle, en en rajoutant, en en exagérant les contours, pour toujours espérer en répéter le succès. Bien entendu, ça ne fonctionne plus et vous n'avez envie que d'une seule chose : que votre ami se taise et tourne enfin la page sur sa blague ! Eh bien, c'est exactement le cas ici pour Judd Apatow qui, bien sûr, nous a souvent habitué à des comédies bien plus longues que la moyenne (un point récurrent et clivant de sa filmographie, on ne s'en est jamais plaint personnellement) mais qui, avec "The Bubble", montre des limites qu'on ne lui connaissait pas en ne sachant plus trop quoi tirer de cette bulle sur une durée de deux heures sinon d'en grossir le trait sur toutes ses conséquences jusqu'au ridicule (voire la gêne dans certains cas, l'incident avec la sécurité est le point de bascule vers le n'importe quoi pas drôle) ou d'étirer des situations amusantes au point de les assécher de la moindre once d'humour. Les (vrais) acteurs ont beau toujours se livrer avec bon cœur aux péripéties les plus farfelues, les caméos sympathiques se multiplier et quelques rares bonnes vannes faire leur petit effet ("Arrête d'être Benedict Cumberbatch !" haha), "The Bubble" s'enlise et fatigue par sa redondance futile aux antipodes des rires de ses débuts. Il fallait clairement faire éclater cette bulle plus tôt car cela restera sans doute comme le long-métrage de Judd Apatow le plus faible à ce jour. Dommage.