Phone Game prend un parti audacieux en proposant un huis clos dans une cabine téléphonique, et ma foi le résultat est convaincant. Les critiques presses et spectateurs se rejoignent pour lui accorder un bon avis, et je dois dire que c’est justifié.
D’abord le casting est solide. Jusqu’à maintenant Colin Farrell c’était un peu comme la pauvre Gemma Arterton, c'est-à-dire un acteur que je n’avais pas franchement vu dans des films très emballants (à vrai dire j’avais déjà vu Phone Game, mais il y a longtemps et je n’avais plus beaucoup de souvenirs). Ici il se débrouille fort bien, d’autant plus, il faut le dire, que tout le film repose sur lui, et qu’il a vraiment un travail de composition costaud à produire. Il est précis, ses réactions sont réalistes, son personnage et intéressant et évolue de belle manière, honnêtement il est réellement à la hauteur de l’enjeu et prouve qu’il peut porter un métrage sur ses épaules. Évidemment le reste du casting tient une place mineure en comparaison, mais tout de même, il serait mal venu de ne pas prendre en compte une prestation solide de Whitaker, et, bien que moins exploitées, les deux femmes du film : Katie Holmes et Radha Mitchell, la seconde ayant tout de même à assurer le rôle d’une épouse crédible dans une situation pas forcément simple.
Le scénario est surtout solide dans le sens où il est rythmé, ce qui n’était pas une mince affaire compte tenu de l’idée de base. Le début est cependant un peu agaçant, très bavard et à la linéarité laborieuse (on dirait un dialogue de Tarantino). Heureusement par la suite, passé le premier quart d’heure je dirai, on rentre dans le vif du sujet, et l’arrivée de Whitaker amène du sang neuf ! Pour ma part je trouve l’intrigue plaisante, originale, même si Appel au meurtre se plaçait dans un registre similaire, avec toutefois le sentiment d’un manque de courage pour aller jusqu’au bout de l’idée. Et bien oui, tout de même, Sutherland s’attaque ici à un homme infidèle, et au fond le spectateur tend à prendre fait et cause pour le pauvre Farrell qui n’est pas non plus un monstre. Le face à face avec le pédophile par exemple mentionné par Sutherland aurait sans doute engagé un propos déjà nettement plus relevé en brouillant beaucoup plus les pistes entre bien et mal. La fin est par ailleurs un peu décevante tout de même.
Coté réalisation Schumacher, loin des grosses machines se débrouille comme un chef. C’est alerte, il sait faire monter la tension lorsque Farrell joue avec le feu, et on sent qu’il a travaillé ses plans, qu’ils sont pensés, avec un usage notamment brillant des plongées et contre-plongées. La photographie est pour sa part décevante. Elle abuse du bleu, elle a un coté artificiel très moyen, et je ne pense pas, de surcroit, qu’elle se justifiait franchement ici. Dans un film de serial-killer pourquoi pas pour glacer l’atmosphère, là c’est plus discutable. Quant aux décors, bon il n’y a pas grand-chose à dire, tout se passant sur une artère de New York autour d’une cabine téléphonique. A noter que le film n’offre pas de vraie bande son, il est vrai aussi qu’il n’en a pas vraiment besoin.
Alors en conclusion je dirai que Phone Game est un thriller en huis clos bien mené pour le genre. L’idée est solide, et Phone Game rend mieux qu’Appel au meurtre sur un registre similaire, et que j’ai déjà critiqué. Néanmoins il n’ose pas assez à mon sens, il évite de s’aventurer vers une cassure du manichéisme habituel, et du coup cela en affadi sa portée et son sens. Si j’ajoute à cela la photographie bien moyenne, et quelques petites anicroches (le début trop bavard…) cela fait tout de même des défauts, et ca se ressent vite dans un film qui ne peut pas s’appuyer sur d’autres atouts. Alors je lui donne 3.5.