Après avoir repris du poil de la bête avec "The Manor", l'anthologie de films 2021 "Welcome to the Blumhouse se conclut donc avec "Madres", un film qui avait clairement la capacité d'être le plus glaçant du lot par l'étonnante gravité du sujet qu'il aborde mais qui, faute d'une écriture à la hauteur de ses ambitions, fait tous les plus mauvais choix pour le traiter.
Dans les années 70, un couple s'installe à Golden Valley en Californie pour démarrer une nouvelle vie et élever son futur enfant. Alors que Beto, son mari mexicain installé depuis plusieurs années aux États-Unis, s'intègre facilement à la communauté de travailleurs immigrés agricoles dont il a la charge, Diana, une américaine élevée loin de ses racines hispaniques, connaît plus de difficultés à s'y épanouir. En procédant à l'aménagement de sa maison, elle devient la proie d'une présence qui semble la pousser à enquêter sur un mal en train de ronger la région...
"Madres" démarre pourtant bien en se focalisant sur les racines communes de ce couple que chacun aborde différemment selon son milieu d'origine, le film en fait même une espèce de socle dans sa façon d'aborder avec dualité chacun des obstacles mis sur leur route selon le regard qui s'y pose. Lucia est-elle victime d'hallucinations ou d'un fantôme ? Y a-t-il une malédiction ou un danger humain aux alentours ? Les agissements de certaines personnes sont-ils si désintéressés derrière les sourires de façade ? En oscillant lui-même entre l'épouvante cheap et le thriller amorphe, "Madres" cherche en permanence à semer le doute... là où il n'y parvient en réalité jamais car, une fois tous ses pions mis en place, et hormis les contours de certaines motivations, le film est presque complètement transparent sur ce qu'il cherche à raconter au bout d'à peine une demi-heure.
Dès lors, "Madres" ne sait jamais comment décoller, s'enlisant entre les effets faciles d'une énième intrigue de fantôme ayant un message à faire passer d'outre-tombe et ceux fatigués d'une enquête sur une conspiration qu'aucune surprise ne viendra jamais bousculer jusqu'à ce que les masques tombent. Conscient que la vague d'ennui qui submerge son film est totale, Ryan Zaragoza tente de faire bonne figure derrière la caméra avec quelques effets de style mais, d'un spli-screen à l'inutilité sidérante à (tout de même) une jolie idée de mise en scène finale de victimes, rien ne vient jamais sauver "Madres" de la léthargie dans laquelle il nous plonge si aisément. Même le climax du long-métrage sera d'une mollesse impardonnable, venant parachever le manque total d'imagination de cette production pour atteindre l'importance capitale de son sujet, le film en devient même -et c'est le pire- quelque part assez putassier par les voies scénaristiques fainéantes qu'il emprunte et son absence de prise de risques afin de traduire avec force l'ampleur du terrible drame humain qu'il place en son coeur. Seules les ultimes secondes, sous forme de panneaux à la vérité clinique, viendront nous glacer le sang et même nous révolter en se raccordant à l'actualité.
Bien sûr, on pourrait être indulgent avec "Madres" car il a le mérite de mettre un sujet souvent passé sous silence ou peu connu du plus grand nombre, c'est bien là sa qualité la plus notable, mais, bon sang, il ne faut pas le faire comme ça, pas avec un film aussi épouvantable qu'insignifiant dans ses ressorts grossiers, il y a tellement plus intéressant à produire cinématographiquement pour dénoncer la cruauté d'actes aussi infâmes.