Black Phone n'est pas exempt de très bons côtés. Son entrée en matière déjà avec la présentation de ses enjeux. Le démarrage est tout ce qu'il y a de plus encré dans l'enfance d'une petite ville américaine. Un match de baseball, des petites déceptions et des grandes joies. Faire s'envoler une fusée, rouler au milieu de la rue à vélo. Et puis un van pour faire basculer cette ambiance légère dans l'anxiété d'un générique froid et initiateur de la suite.
Des gamins disparaissent. Et tout n'est finalement pas si rose.
On entre dans la vie de Finney et de sa soeur qui va s'inscrire dans le prolongement de cette enfance pas si insouciante. Des bagarres et des intimidations à faire passer mes altercations de jeunesse pour des concours de carresses. Un père veuf encore marqué par la perte de sa femme et un brin despote sur les bords, châtiments corporels à l'appui.
Toute cette mise en place, même si elle n'est là que pour servir la suite est véritablement bien fichue. "L'agrippeur", tel que les médias le nomme, s'y dévoile peu à peu à mesure que l'entourage prépubère de Finney disparait. On sait où Scott Derrickson veut nous emmener mais il sait s'y prendre pour le faire de manière échelonnée, jusqu'à la rencontre fatidique entre Finney et son kidnappeur.
S'engage alors une deuxième partie, la plus importante, qui malgré quelques bonnes idées esthétiques me laisse plus dubitatif dans son déroulement. Et difficile d'en parler sans trop en dire.
Il y a bien sûr Ethan Hawke, aussi calme et rassurant que dérangé, véritablement inquiétant jusque dans les plans fixes où il reste à attendre, mutique, sur sa chaise, mais il y a surtout ce superbe masque aux facettes interchangeables derrière lequel il se retranche. Il y a aussi les apparitions de ses précédentes victimes qui permettent d'ajouter encore au caractère désespéré de la situation, l'issue fatidique semblant de plus en plus inévitable, et provoquent quelques petits jumpscares bienvenus à la manière d'un 6ème sens.
Alors qu'est-ce qui cloche me direz-vous ?
Et bien c'est ce téléphone noir du titre, cette dimension un peu surnaturelle déjà initiée par les rêves prémonitoires de la soeur de Finney. Certes, il s'agit là de personnalisations successives de ses craintes mais je reste avec le sentiment que ces différentes étapes vers sa porte de sortie aurait quasiment eu autant d'impact sans passer par la case fantastique. D'ailleurs, le piège qu'il tend, un peu à son insu au final, pour s'extraire des griffes de son bourreau n'en aurait peut-être été que plus délectable s'il avait doucement germé de son esprit au lieu d'être traité comme un ensemble d'actions à priori sans lien les unes avec les autres. Certes, celà à un petit côté "je l'avais pas vu venir et tout s'emboîte parfaitement" (même si je l'avais un peu vu venir) mais la résolution du puzzle façon escape game en devient légèrement tirée par les cheveux.
Ainsi, même si on passe un bon moment sans jamais décrocher, que certaines scènes poussent assez adroitement le curseur "tension" à son maximum, ce Black Phone ne m'a convaincu qu'à moitié et je me demande ce qu'il aurait pu donner sans cette touche d'irrationnel.
Mention spéciale pour l'inutile, même si assez drôle, présence du frère de notre tortionnaire qui n'apporte pas grand-chose au film non plus.
Un film où tout les éléments ne sont pas si bien combinés.