« Mes rendez-vous avec Leo » ne parle pas que de sexe tarifé entre une dame de 60 ans et un jeune prostitué de luxe ; en ce qui me concerne, le film parle du corps, celui d’une femme âgée de plus 60 ans.
Comment accepter ce corps aux chairs relâchées, usé par le temps et par une misère sexuelle ?
Si sa sexualité avait été épanouie, non seulement Nancy n’aurait pas eu recours à un escort boy, mais elle aurait accepté ce corps naturellement éprouvé par l’âge.
Du reste la fin du film est très forte, et quelque part confirme mon propos : Nancy finit par accepter ce corps.
Si elle finit par l’accepter c’est grâce au regard bienveillant de Léo (Daryl McCormack), qui a su trouver les mots et les gestes. Certes, me direz-vous, il est payé pour ça.
Peu importe, Nancy voit son corps valorisé après des séquences de sexe où elle paraît prendre du plaisir. Elle retrouve aussi une estime de soi.
D’aucuns iraient voir un psy, Nancy a choisi un escort boy.
Et elle est bien tombée avec Léo. Ses rendez-vous n’ont pas été strictement sexuels, de longues conversations lui ont permis de reconnaître ses erreurs passées en qualité d’enseignante de religions.
Ce qui fait mal, selon moi, c’est cet analphabétisme de la sexualité.
Nombre de femmes sont dans ce cas (et hommes aussi !). On pratique la sexualité pour enfanter, pour satisfaire de temps à autres son homme ou sa femme, parce que c’est dans l’ordre des choses, parce que ça se fait.
Mais où est le plaisir la dedans ?
La notion du plaisir même est-il évoqué dans nombre de couples ?
Pense-t-on à la quête du plaisir ? De la jouissance ?
Nancy avoue avoir été négligée par son mari, avoue n’avoir jamais connu l’orgasme et avant de mourir -
maintenant qu’elle est veuve
-, a trouvé le courage d’aller voir un escort boy pour l’initier, pour l’ouvrir à une sexualité épanouie.
Pas la sexualité qu’à connue Nancy, une sexualité besogneuse, rapide, égoïste, analphabète.
Oui, il faut du courage pour contacter un escort boy.
Oui, il faut du courage pour avouer son ignorance en matière de sexe.
Oui, il faut du courage pour lâcher prise.
Oui, il faut du courage pour remettre en question ses tabous, ses peurs.
Un huis clos drapé de soie aux dialogues bien au carré et avec une Emma Thompson qui a eu le courage de dévoiler son corps devant un miroir. Longue séquence où Nancy-Emma Thompson se confondent. Il ne faut pas se leurrer, le corps de Nancy est bien celui d’Emma Thompson.
Le regard presque amusé est bien celui d’Emma Thompson alias Nancy.
Enfin, Sophie Hyde nous dit aussi qu’il n’est jamais trop tard pour jouir de son sexe. Il ne devrait y avoir aucune honte à s’adresser à un escort boy.
On le sait depuis longtemps, les prostituées, celles des maisons closes, prostituées déclarées, libres d’exercer ont toujours joué un rôle important dans les relations publiques, elles (ils) ont contribué (et contribuent encore sous couvert) à l’apaisement des pulsions et à bien des blocages psychologiques. Elles ont été bien plus efficaces que des psys.
Sophie Hyde me dit aussi qu’un corps maltraité par l’âge, maltraité par une misère sexuelle, car le corps n’est pas entretenu physiquement et physiologiquement, dévalorisé ne semble pas perdre son potentiel de jouissance.
A voir en V.O pour l’accent so sexy d’Emma Thompson…