Dans la réalité, Elisabeth de Wittelsbach meurt assassinée à Genève en 1898 par un anarchiste italien . Elle a 60 ans. Dans le film de Marie Kreutzer, elle se jette de la proue d'un navire en pleine mer. Elle a tout juste 40ans passé... Toute sa vie l'impératrice Sissi a détesté la cour de Vienne et l'étiquette autrichienne. On est donc loin de Romy Schneider dans le film de Ernst Marichka de 1955 qui fige l'image d'une Sissi pétillante qui rencontre son futur mari, venu épouser sa soeur aînée, lors d'un quiproquo survenu lors d’une partie de pêche ...
Curieux biopic donc dont on ne voit pas bien la raison exacte... l'interprétation de Vicky Krieps est splendide et les décors qui se s'embarrassent pas de laisser paraître rampes en inox et interrupteurs électriques aussi ... Mais quel est l'objet du film (car on n’est plus dans la simple distorsion historique) ? La vie étouffante d'une femme qui fuyait le monde et sans doute elle même, en Hongrie, en Italie, à Madère ... ? Une femme obsédée par sa beauté, son age et son poids, qui voulait peser 50 kg pour 1,72m (55,9 kg dans le film) et qui pratiquait du sport du matin au soir, à cheval, aux agrès, à l'escrime et qui se faisait corseter très fermement pour n'être capable d'avaler qu'un bouillon de viande, dont la neurasthénie finit par toucher la vitalité et la joie de vivre...
il n'y avait pas besoin de réinventer Sissi car l'impératrice était à elle seule un personnage de roman . Elle fume, elle prend des libertés, est, comme on dirait aujourd'hui, borderline à tel point que Louis II de Bavière finit par lui dire d'aller se noyer dans un autre lac que le sien, à Starnberg, où il se noiera effectivement... Alors de quoi s'agit-il? D'un portrait féministe de la mélancolie, mal de cette fin de siècle, souvent diagnostiquée par les médecins viennois ? D'une ébauche de la folie ? D'une dénonciation de la condition féminine au sein de l'aristocratie empesée de l'Autriche finissante ?
Il y a toute une littérature pour ça . Dommage que Stephan Zweig n'ait pas écrit sur Sissi comme il l'a fait pour Marie Antoinette. Mais, en Autrichien exigeant, il n'a pas du trouver le personnage si intéressant, sans doute aussi parce que Sissi meurt sans rencontrer l'Histoire comme son héroïne favorite prise dans la Révolution française ...
Bref tout ce film m'a dérangé sans me déplaire mais sans me convaincre non plus... Sissi fume, Sissi est inconvenante, Sissi fuit ses responsabilité et préfère s'entourer de Dames hongroises, Marie et Ida et ... de ses anciens amants ... Elle disparaît dans le film en 1878 (pourquoi cette date?) alors que dans la réalité les épreuves ont commencé à poindre et que la mort mystérieuse de Rodolphe, son fils, en 1889, avec sa maîtresse, dans son pavillon de chasse de Mayerling sera le début d'une dépression qui prolonge en fait une vie d'errance dans laquelle l'impératrice, revenue de tout, s'ennuie, n'aimant plus son mari l'empereur trop occupé et cédant malgré tout à tous ses caprices, n'aimant plus ses cheveux qu'elle coupe, indifférente sûrement aux grands changements européens engagés à Vienne depuis 1848.
Un film qui n'a rien à voir avec celui de Sofia Coppola qui était fortement sourcé avec quelques raccourcis de génie ... ici je n'en ai pas vu.