Militantisme souriant
Après Discount, et Les Invisibles, Louis-Julien Petit continue sa série de comédies sociales avec ces 97 minutes plus que réussies. Depuis toute petite, Cathy rêve de diriger son propre restaurant. Mais à quarante ans, rien ne s'est passé comme prévu et elle se retrouve contrainte d'accepter un poste de cantinière dans un foyer pour jeunes migrants. Son rêve semble encore s’éloigner… ou pas ? Le film sur le sujet crucial de l’intégration des mineurs abandonnés certainement le plus attrayant qu’on puisse voir. Superbe scénario, dialogues savoureux et casting parfait. Merci !
Donc, après les laissés pour compte de la mondialisation, les femmes SDF, voici le foyer de jeunes migrants en attente de régularisation. Parallèlement, le scénario original – assez rare pour être souligné, fustige aussi les excès de la cuisine spectacle qui envahit les soirées télé depuis des années. Mettre au centre de l’intrigue une cheffe égocentrique et sûre d’elle et la suivre dans sa plongée forcée dans un foyer à des années lumières de ses préoccupations, provoque, dans un 1er temps des situations comiques puis une vraie prise de conscience. C’est sacrément bien écrit, bourré de tendresse et d’humour et emporté haut la main par une distribution qui y croit. Le film a été tourné sur la côte d’Opale début 2021, où un froid polaire, une tempête et des inondations ont cassé du matériel caméra... Puis, le variant anglais du covid-19 est venu s’inviter sur le plateau, en contaminant plusieurs membres de l’équipe. Sans oublier la rupture du talon d’Achille de François Cluzet qui a nécessité de réécrire une partie des scènes. Malgré tous ces obstacles, - et peut-être grâce à le force qu’il a fallu pour les franchir -, voilà un film drôle, sensible, qui fait réfléchir. Un vrai bon moment.
Audrey Lamy - prix de la meilleure actrice au Festival de l’Alpe d’Huez -, est une tornade et emporte tout sur son passage. Très convaincante dans son rôle de râleuse qui sait ce qu’elle veut et dont les certitudes vont être bouleversées par la misère du monde. François Cluzet et Chantal Neuwirth, - deux personnes que j’adore -, lui donnent la réplique à la perfection. Ces 3 acteurs chevronnés encadrent une noria de jeunes vrais migrants, tous excellents, castés dans diverses associations d’accueil parisiennes. Je retiendrai surtout le nom du tout jeune Yannick Kalombo qui a une présence étonnante. Louis-Julien Petit n’est sans doute pas un grand cinéaste, mais c’est un virtuose du scénario qui frappe juste et de la direction d’acteurs et actrices non professionnels. C’est déjà pas mal, et ça nous donne des films plus qu’honorables à la hauteur du duo Nakache – Toledano. Du militantisme souriant, ça fait du bien.