Guillaume Gouix, qui signe son premier long métrage après trois courts, a toujours aimé les héros de cinéma qui osent faire ce que l'on ne fait jamais en raison des conventions. Il précise : "J’aime les héros qui disent « merde ». Quand on vit un deuil, on peut avoir envie de dire « merde » à ces conventions, à ce que les autres attendent de nous en tant qu’endeuillé, comme si on avait un rôle à endosser."
"Le personnage de Lola n’a pas envie de respecter le protocole. Elle ne sait pas quoi faire de sa colère et de sa peine. J’avais envie de raconter cette femme qui veut gérer le deuil de son compagnon à sa manière et s’enfuit le jour de ses obsèques avec son fils et sa sœur."
Guillaume Gouix a cherché à faire un film sur le deuil qui ne soit pas morbide, mais plutôt du côté de la vie. Le cinéaste précise : "Un film qui va chercher une énergie, insolente, lumineuse. Lola est en deuil mais elle porte des chemises à fleurs et cherche le soleil, et dehors et dedans, et Margaux, elle, profite de cet élan pour sortir de son quotidien."
Côté références, Guillaume Gouix avait en tête des photos de Nan Goldin pour sa manière de montrer la peau. Il confie : "Élodie et Alysson étaient très peu maquillées, on voit leur grain de peau. Il y a parfois sur elles comme un effet flash dû à l’arrière-plan plus assombri. Le film a un côté un peu punk dans la manière dont il s’est construit, il a d’ailleurs été fait avec cet état d’esprit jusqu’à l’étalonnage et au mixage son. Il devait y avoir une sensation de liberté, un geste."
Guillaume Gouix a collaboré avec le directeur de la photographie Noé Bach, qui a oeuvré sur des films comme La Terre des hommes et Les Sans-dents : "Il a dû accepter de lâcher prise sur ce film, peut être parce que j’ai d’autres méthodes de tournage, sans doute moins conventionnelles."
"Ce qui comptait pour moi, c’était que la caméra suive les actrices et les acteurs. C’est un film qui repose sur quelque chose de ténu, alors il ne peut supporter que l’authenticité. Je voulais qu’on soit proche des personnages, qu’on les regarde, qu’on vive à leurs côtés et qu’on ait envie de les embrasser à la fin."
"Je voulais qu’Alysson, Élodie et Viggo se sentent libres de faire ce qu’ils voulaient, de bouger comme ils avaient envie de bouger dans l’espace, de laisser venir les rires, les gestes et les cris, et que la caméra soit toujours à leur service, mais sans perdre nos envies esthétiques."
Guillaume Gouix a favorisé les tons chauds et a utilisé le format 1.33. Il justifie ce choix : "D’ordinaire, on imagine les road-trips en scope. En tant que spectateur, on a en tête ces plans de routes et de grandes étendues. On a voulu prendre le contre-pied de ça : que les visages deviennent les paysages qui nous font ressentir un voyage. On ne devait pas voir le contour. Il fallait être radical si je voulais qu’on ne lâche jamais ces actrices et ce jeune acteur, qu’on les enferme, qu’on sente leurs souffles."
Guillaume Gouix avait en tête Alysson Paradis et Élodie Bouchez dans les rôles principaux dès l'écriture du film : "Il se dégage de chez Alysson un truc assez sauvage, un mélange atypique de féminité et de mauvais garçon. En tant qu’actrice, son jeu et son allure m’ont toujours inspiré quelque chose du cinéma de Gus Van Sant et de ses personnages écorchés mais vivants."
"Lola n’est pas un personnage qui végète, elle veut rouler, elle n’a pas envie qu’on lui pleure dans les bras, elle n’a pas envie qu’on la regarde avec pitié. Elle est libre, mais de manière un peu surprenante avec ce que ça comporte d’égoïsme, surtout envers son enfant. Alysson correspondait complètement à ce que j’avais en tête pour le personnage de Lola : un peu insolent, haut en couleur."
"Un tempérament très différent de celui du personnage de Margaux en « apparence » plus classique. Pour l’incarner, Elodie réalisé par Ava Cahen Bouchez m’est apparue comme une évidence une fois le scenario terminé. C’est une actrice que j'ai toujours admirée. Élodie a cette grâce, ce sourire et cet humour qui contrastait avec ce que l’on pouvait lire du personnage."