Superbe fresque sur la fin d’une époque, où se heurtent modernité et traditions ancestrales, où se nécrosent peu à peu les derniers vestiges d’une civilisation, tout comme on emmure vivant, entre des murs dorés dont le faste ne fait que ressortir encore plus l’aridité solitaire, l’Empereur de Chine. « Le dernier Empereur » emporte le spectateur dans la mouvance de temps troublés, hâtifs, aux errances d’un personnage trop vite grandi, et le fait réfléchir ; sur le sens de l’évolution, sur l’ironique vie d’un homme destiné à demeurer pour tous celui qui vit la fin d’un lourd règne, et le début d’une ère nouvelle.
La musique, aux timbres reconnaissables entre tous, hésite entre occidentalisme latent et symphonies orientales, les images se succèdent et l’émotion étreint bien souvent : les premiers émois d’un adolescent timide, la fragilité d’une épouse royale au visage pâle sous ses fards, la terrible histoire politique d’un pays complètement déchiré, sont autant de fléchettes dans l’esprit du spectateur. On ne peut s’empêcher de faire la comparaison, évidente, avec le délicieux roman de Pearl Buck (prix Nobel dans les années 40) « l’Impératrice de Chine », narrant en détails la vie de Tzu Hi, impératrice douairière, celle qui nomma au trône Pu Yi, dont nous suivons, avec Bertolucci, les quelques traces.
Un voyage dépaysant, intelligent, vif, alerte, et sensible.