“El Buen Patron”, un titre simple qui pose les bases d’un sujet compliqué : les relations humaines. Dans le cinéma, le bon et le mauvais sont souvent bien dissociés (gentil/méchant), les limites sont posées entre ce qui est fondamentalement bon ou mauvais. Sauf que là, l’histoire tourne autour du monde de l’entreprise et le comportement du patron Julio Blanco (Javier Bardem) n’est pas manichéen. C’est un personnage complexe qui ne semble pas mauvais dans le fond, un peu toqué certes, mais il essaye de faire ce qu'il lui semble juste pour son équilibre et celui de l'entreprise familiale auxquels il tient plus que tout. Les situations vécues nous ramènent souvent à nous dire qu’il a une vision claire sur la vie, malgré sa conception paternaliste du monde. On arrive aussi à exprimer de l’empathie dans les événements vécues par Julio et le sentir complaisant envers ses salariés, avec parfois une action désintéressée (ne cherchant pas à obtenir un statut social ou bien matériel par son action). En entreprise, tout est une question de choix, et il suffit de tirer la mauvaise ficelle pour se retrouver dans une sale posture. Dans “El Buen Patron”, il y a de multiples ficelles, et la plus surprenante reste la somptueuse Liliana (Almudena Amor). Je trouve admirable la manière dont sont posés les dialogues, les comédiens n’en font jamais trop, C'est bien dosé et très réaliste.
Au vue de la tension marquée sur la dernière heure, j’ai eu peur de tomber dans la folie des films de Pedro Almodóvar avec un final complètement fou, mais le twist prend une autre tournure bien plus cynique, à savoir :
l’arrivée de la commission
, empreint à une réalité qui n’est plus à démontrer, devant une entreprise en apparence parfaite,
mais comme nous l’avons vu pendant les 90 minutes précédentes, la réalité bien cachée, en est tout autre
.
Mais surtout,
j’ai beau eu croire que le patron Julio Blanco était un homme honnête et entier. L’excellente dernière scène : le prix remis par la commission et fixé dans le salon chez Julio par Fortuna, le trahit complètement et nous renvoie l’image que j’avais initialement perçu de lui, un patron qui considère ses employés comme des machines pour faire fonctionner l’entreprise familiale dont il a simplement hérité. A ce moment, ses dires et attentions ne sont que politiques, pour son propre intérêt et complètement déshumanisées. Julio apparaît dès lors comme un manipulateur.
C’est grâce à cette dernière scène qu’on comprend alors que
lorsque les jeunes délinquants dont le fils de Fortuna fait partie, viennent brûler la voiture et tabasser l’ex-salarié manifestant Rubio (Rafa Castejón), le gardien de l’usine Roman (Fernando Albizu) est absent car le patron lui a donné congés et lui a offert les places de spectacle auquel Julio devait assister, un des seul actes charitables et désintéressés dont Julio faisait preuve, devient finalement un acte qui rentre complètement dans son intérêt. Une magouille du patron Julio Blanco avec le fils de Fortuna qui était présent quelques heures auparavant devant le magasin de sa femme Adela (Sonia Almarcha) pour virer l’ex-salarié Rubio de manière complètement illégal et par la force. Le fils de Fortuna y trouvera la mort dans des obsèques et un discours de Julio qui montrera toute l’hypocrisie du personnage. Rubio était le dernier point bloquant avant l’arrivée de “La Commission” qui en fait comptait plus que tout le reste pour Julio. Finalement, pas si “Blanco” le Julio…
Un film avec de subtiles contrastes qui montrent habilement la complexité des relations humaines, une très belle surprise.