Présidents, film écrit et réalisé par Anne Fontaine raconte l’histoire de deux présidents de la République française, Nicolas (Jean Dujardin) et François (Grégory Gadebois) qui, malgré leurs oppositions politiques décident de faire front commun contre l’extrême droite grandissante. Toute ressemblante avec des personnes existantes sont bien évidemment fortuites.
Le film prend dès le début un parti pris : celui de montrer les présidents dans une banalité la plus totale, dans le train-train quotidien, et cela se sent dès l’une des premières répliques de Dujardin : « J’aime bien passer l’aspirateur ». Et ce sera le fond comique le plus présent dans le long métrage, nous balancer à la figure la banalité de ces hommes qui étaient présidents.
Le film est dans l’ensemble bon, mais avec peu en plus. Il se laisse regarder avec plaisir et si je ne pense pas qu’il ait de défauts majeures, je ne trouve pas tant de qualités importantes que ça.
Alors bien évidemment, Jean Dujardin ne vole pas sa tête d’affiche et se démarque nettement de son comparse, que ce soit dans la qualité du jeu et de l’imitation (imitation de qui ? Je ne sais pas…) ou dans le temps à l’écran, même si Grégory Gadebois ne reste pas sur la touche.
L’humour fonctionne bien, il est tout de même conseillé d’avoir une légère culture politique pour comprendre les références les plus poussées, mais sinon, se souvenir des trois derniers présidents de la République (un certain Emmanuel est mentionné) et leur bord politique suffit pour la majorité des blagues. Le rythme des blagues est dans l’ensemble bien mesuré, les comiques de répétitions sont bien schématisés, tout comme les comiques de situation, mais il y a un risque que le ridicule ne fonctionne pas si l’on n’a pas déjà un certain respect pour les inspirations des personnages (car oui, plus j’y réfléchis, plus je me dis que ce sont des personnes réelles qui ont inspirées Anne Fontaine). Le ridicule burlesque est d’ailleurs très peu présent (scène du fossé) et n’en marche que d’autant plus.
Les dialogues sont très bien écrits et possèdent des petites perles de détails qui font bien sourire quand on les remarque (« Moi et François » ; « Moi et Nicolas »), et certaines mises en scènes sont d’ailleurs très intéressantes et fonctionnent beaucoup, que ce soit dans le sourire ou dans l’émotion. Car il y a un petit peu d’émotion quand même, mais bien dosée, c’est-à-dire qu’elle n’est pas envahissante d’un seule coup sur deux scènes avant de repartir, ce qui est un gimmick poncif dans les comédies françaises. Non, là, l’émotion se construit avec l’humour, au fur-et-à-mesure. Aussi le fait d’avoir des acteurs qui jouent un rôle et non pas des humoristes qui se jouent eux-mêmes, cela fait du bien (je te vois Elie Semoun).
On regrette néanmoins le scénario un peu plat, surtout la fin qui restait très prévisible. Je pense que c’est le film lui-même qui s’est enfermé, ce qui donne une fin attendue, donc forcément plus décevante, car c’est la seule solution qui se proposait pour conclure sans incohérences dans le thème.
J’aime personnellement beaucoup le parti pris d’Anne Fontaine qui est de montrer les présidents dans la normalité la plus triste parfois, de montrer les effets qu’on eut le pouvoir et la fonction sur eux, surtout ceux néfastes, comme l’égo, certes, mais aussi le stress ou la fragilité mentale. Le scénario est lui aussi tout aussi simple, c’est l’histoire d’un homme sûr de lui avec des ambitions qui rencontre un homme plus hésitant, chacun va se confronter à l’autre et apprendre de l’autre. Le premier se remet en question tandis que l’autre gagne en assurance et en ambition. C’est du classique dans le cinéma comique français, mais du classique donné sur une toile originale qui vient à la fois redorer le blason de ces deux hommes de la même manière qu’elle déconstruit leur image.
15/20