"Mémoires d'une geisha" est un film poétique, grâcieux, élégant et intelligent. Véritable reflexion sur l'honneur d'être l'une de ces filles destinées à divertir de riches hommes, Rob Marshall n'oublie pas de nuancer son oeuvre en présentant un à un les sacrifices que cela impose, les peines que cela comporte, et la tristesse que cela inspire. Aussi, le cinéaste nous accueille dans sa trés belle aventure, aux côtés d'une jeune fille timide mais caracterielle qui, aprés avoir perdu ses parents et sa soeur, s'emprisonnera dans des ambitions qui la dépassent et qui ne semblent pas à portée de main. Du début à la fin on suit donc le parcours tantôt chaotique, tantôt attirant, de ce personnage torturé qui prendra les traits, adulte, de Zhang Ziyi. Magnifique actrice, qui ne laisse filtrer aucun faux pas et porte sur ses seules épaules l'émotion de tout le film. En toile de fond, on retrouve la guerre mondiale qui créera des séparations, des déchirements, des fantasmes oubliés et des rêves égarés. Les décors sont d'une beauté éléctrisante, si bien que chaque environnement recéle de détails artistiques particuliérement splendides. Quant à la photographie, là, c'est la prosternation. Rarement la photo n'aura servi autant dans une oeuvre, mais faut reconnaitre que "Memoires d'une geisha" c'est avant tout une richesse visuelle qui, pour le coup, a une dette envers Dion Beebe qui a réalisé un travail stupéfiant. La mise en scéne soignée de Rob Marshall est fluide et ne laisse filtrer aucune brutalité et sait se faire discrete dans les moments les plus graves. Musicalement, bien qu'un florilége d'opinions positives ont déferlé dans les journaux, louant le génie de John Williams, je n'ai accordé que peu d'attention à la bande originale qui n'a pas su, à mes yeux, éviter les clichés en s'impregnant de l'ambiance générale. Sans être mauvaise (parce que c'est une partition de qualité), aucun sentiment ne m'a percuté à son écoute. "Memoires d'une geisha" est donc un trés bon film, qui s'apprécie essentiellement pour sa premiere moitié vraiment brillante, et la seconde plus classique mais efficace. Une belle oeuvre pour un metteur en scéne qui sait varier les genres (mais n'atteint pas toujours le même niveau).