Sur de nombreux plans, Padrenostro est un long-métrage captivant, nous plongeant dans une famille italienne où le père est victime d'un attentat au milieu des années 70. Tout, y compris la fusillade, est vécu à travers les yeux du fils, âgé d'une petite dizaine d'années, traumatisé par la violence que son père a subi. Excellemment mis en scène, notamment pour sa belle partie calabraise, le film de Claudio Noce, qui a lui-même vécu un événement similaire (mais alors qu'il n'était qu'un bébé) montre comment la peur, insidieuse, transforme une vie de famille, dans une époque où le danger pouvait surgir au coin de la rue. Si l'on est sensible à l'évocation des fantasmes et de la torsion de la réalité ressentis par le jeune héros, sorte d'ange blond qui symbolise l'innocence, on est surpris par l'irruption d'un "ami imaginaire" que le réalisateur fait intervenir presque constamment, adopté par l'ensemble de la famille. Au bout d'un moment, le jeu entre la réalité et la schizophrénie du gamin n'est plus très clair, d'autant que les scènes inaugurale et finale, qui ne situent pas à la même époque que le reste du film, viennent singulièrement brouiller les pistes. Quel est le but poursuivi par Claudio Noce, avec cet aspect étrange de son récit, lui seul pourrait l'expliquer. C'est d'autant plus dommage que, dans un style lumineux parfois proche de Bellocchio, Padrenostro possède de belles armes de séduction.