Teen movie cabossé
En 2106, Olivier Babinet s’était fait connaître avec l’excellent Swagger. Cette fois, pour cette comédie dramatique, il s’est inspiré de la pièce Le Monstre du couloir de David Greig. J’avais hâte de voir ces 87 minutes, car j’avais découvert Babinet en 2016 avec son excellent 1er film Swagger. Et je n’ai pas été déçu. Lucie a 15 ans et une imagination débordante. Elle vit seule avec William, son père, qui, sous ses abords d’adolescent attardé, lutte contre la sclérose en plaques. Entre le collège, un petit boulot et la charge du quotidien, Lucie gère tant bien que mal, et s’échappe dans l’écriture d’un roman autobiographique fantasque, qui navigue entre rêve et réalité… L’annonce de la visite d’une assistante sociale va bousculer cet équilibre précaire. Lucie et son père vont devoir redoubler d’inventivité pour donner l’illusion d’une vie normale. Un sujet aussi délicat qu’original, du cinéma qui fait penser aux Frères Dardenne touchés par la grâce de Miyasaki. Un mélange étonnant pour un film quine l’est pas moins.
Entre teen-movie, fantastique et chronique sociale, ce film est inclassable. La relation père / fille est bouleversante de tendresse, mais ce qui surprend le plus, ici, ce sont les échappées oniriques et fantastiques qui tiennent à distance le misérabilisme pesant. Ainsi le récit échappe-t-il aux cases de la sociologie pure et au drame vécu par ce « couple » pas comme les autres. Tout comme Lucie et son père s’évadent grâce aux films de zombie, aux romans ou aux jeux vidéo, le film prend la tangente en brouillant les genres. Babinet retrouve donc son sujet de prédilection, l’adolescence. D’ailleurs la pièce dont est inspirée ce film, a été créée à la suite d’un atelier théâtre mené dans une banlieue d’Écosse, auprès d’une classe de « jeunes aidants », c’est-à-dire des adolescents qui s’occupent d’un parent isolé, malade, toxicomane ou alcoolique. Présenté comme ça, on se dit qu’on va assister à un pensum, ce qui serait une erreur grossière, car cette comédie dramatique est tout autre chose, car il y a là de la légèreté, de la tendresse et de la drôlerie. Voilà un moment de cinéma atypique
On le sait maintenant, Benoît Poelvoorde est un immense acteur, capable de tout jouer avec une finesse, une subtilité incroyable. Ici, encore il afit preuve d’une présence étonnante et d’une force de conviction peu communes. Justine Lacroix, révélée, en 2108, dans C'est ça l'amour, est un diamant brut parmi les jeunes acteurs et actrices français qu’on découvre actuellement de film en film. Vraiment une actrice à suivre. Citons encore Joseph Rozé et Steve Tientcheu à l’affiche de ce très beau film où l’émotion toujours présente est éclairée de multiples touches de beauté irréelle et de vraies idées visuelles. Vraiment un film à découvrir s’il en est encore temps.