Sacré Tonton Dupieux ! Avec son arrivée en quasi-catimini ("Quoi, y'a un autre Dupieux avant Fumer fait tousser ? Ça alors !"), son affiche assez laide (enfin, d'après nos goûts) et les hordes de spectateurs qui sortent en catastrophe des séances pour nous indiquer (beugler dessus) que l'image "est complètement floue ! Un scandale !"...cet Incroyable mais vrai est un Dupieux qui nous a surpris de bien des façons. Et le visionnage a été une surprise de plus, une bonne cette fois-ci. On a donc découvert cette petite comédie qui réunit Alain Chabat, Benoît Magimel, Léa Drucker et Anaïs Demoustier (tous les quatre au top) pour nous parler du temps qui passe, de la quête ridicule de la jeunesse éternelle et de l'apparat parfait à tout prix, de la superficialité et de la vraie valeur de ce qui est vieux, cassé, "tendrement imparfait". C'est tout en légèreté que Dupieux nous déroule ses thématiques simples mais efficaces, avec du fantastique comique : le
tunnel qui fait rajeunir, mais pas trop, et avec une règle des "12h" de décalage temporel qui ne vous fera, au mieux, rajeunir que de six ans en un an... Pendant lequel vous aurez tout raté. On voit déjà où Dupieux veut en venir avec les règles absurdes du tunnel,
et si l'on ne l'a pas déjà saisi, l'aspect visuel du film vous le donne en mille. Oui, c'est flou. Très flou, et même non uniformément flou (le film a été tourné avec un vieux zoom des années 80 cassé, ce qui donne ce flou aléatoire si étonnant), mais on finit par l'aimer, ce visuel vieillot, qui fait le point toujours à côté de la plaque, exactement comme les vieux films de Tonton, caméscope au poing, heureux de nous faire subir quelques images de famille dignes du pire réalisateur. Ça nous manquait, et on s'est senti nostalgique face à ce Tonton Dupieux caméscope au poing. Quand on repasse à des images plus nettes, plus "parfaites", on remarque qu'au lieu d'être soulagé, on regrette les moches. L'esthétique du film souligne bien le sujet, et on aime aussi que la quête de la beauté éternelle ne soit pas réservée qu'au personnage féminin (trop souvent le cas dans l'Art... Ah, cliché, quand tu nous tiens), mais se diversifie avec le personnage de Magimel qui veut rester le macho viril parfait...en se faisant poser
un kiki électronique
, plus performant, plus imposant, à l'épreuve des aléas de la vieillesse. Là aussi, Dupieux veut rassurer ces Messieurs : la quête de la grosse moustache, du mec qui empêche Madame de parler à table, qui tire à la carabine pour se sentir bien, qui change l'attirail dans le slip pour du "jamais fatigué" et est obsédé par le sujet au point d'y penser et d'en parler sans arrêt...ce n'est vraiment pas un modèle. Les rires que Magimel nous procure est aussi une catharsis masculine, tout comme Léa Drucker qui veut ressembler à un clip de Britney Spears à la peau toute lisse, sans un cheveux blanc, obnubilée par son miroir, mais qui ne vit pas (ou plus). Les deux personnages payent les pots cassés de leur immaturité, tandis que celui de Chabat, l'homme qui assume de profiter de la vie avec son corps changeant, devient comme une bouteille de rouge qui se bonifie en prenant de l'âge. A la tienne, Tonton Dupieux !