On adore l'affiche, voilà c'est dit. Et peut-être cette dernière nous a trop enthousiasmé à voir le dernier Almodovar (qu'on adore aussi, décidément), car on l'avoue : on n'a pas été déçu totalement par son Madres Paralelas (cela serait un bien grand mot pour une belle œuvre comme celle-ci), mais le scénario n'a eu de cesse de nous surprendre par ses choix, dans le mauvais sens. On ne parle évidemment pas des relations lesbiennes et libres mises à l'honneur ici (avec les scènes olé olé mais sensibles, propres à du bon Almodovar), mais plutôt de l'exploration du thème des "mères parallèles" qui est finalement très peu poussée, ce qui est vraiment dommage. En choisissant par exemple de ne pas inclure dans l'équation les enfants qui grandissent dans une famille qui n'est pas la leur à cause de cet échange, on se prive d'un potentiel émotionnel et tragique fort, de même que l'on aurait pu prolonger le choix de ne pas révéler la vérité sur le long terme (comment l'annoncer à son enfant ? Quelle réaction peut craindre le parent qui le savait et a tu la vérité ? Comment aller vers ses parents biologiques qui sont des inconnus ?... On avait mille questions en réserve, pour ce sujet, et Madres Paralelas n'en pose quasiment aucune). Ici, on reste dans la temporalité du nourrisson, dont un
est décédé
en plus (ce qui empêche l'option d'un échange, le tiraillement de ne pas savoir quoi faire pour la mère qui le sait... Un choix de scénario très dommage, également). Et comment ne pas remarquer que si le sujet principal semble peu exploré, c'est aussi à cause d'un sujet secondaire dont on ne sait pas vraiment ce qu'il vient faire là (une sorte de militantisme pour la mémoire, contre la guerre...), un brin balourd dans sa dramaturgie (la dernière séquence avec les visages gonflés de larmes en gros plans, la musique lacrymale qui va bien, et les gens qui remplacent les squelettes... Est-on toujours chez Almodovar, ou plutôt chez Netflix, qui est co-producteur du film ?). Ces deux sujets (les mamans "parallèles" et le devoir de mémoire) cohabitent mal, et font parfois ressembler ce film à un patchwork mal cousu. Heureusement, Almodovar dégaine ses actrices fétiches que sont Penelope Cruz (la plus belle, la plus solaire, "la plus", quoi... Oui, on l'adule) et Rossy de Palma (on ne se lassera jamais de retrouver sa "gueule" unique et son phrasé caliente, qui pimentent les bons Almodovar), accompagnées de la nouvelle venue Milena Smit (qui nous a convaincu en un clin d’œil). Un casting féminin, comme bien souvent, qui nous a encore mis dans sa poche. Sans atteindre la puissance de Volver sur les thèmes des non-dits et des relations mère-fille, à cause d'un scénario qui s'est (de notre très humble avis) égaré, Madres Paralelas s'essaye à l'exercice avec son sujet original, et reste une belle production (malheureusement Netflix, cela se sent...) qui peut compter sur son casting sur mesure et ô combien enivrant...