Olga est un film qui aborde avec justesse différents sujets : Dans un contexte de sport de haut niveau, le film parle de thèmes plus profonds, comme le déracinement, l'éloignement, et la crise politique ukrainienne d'Euromaïdan.
Malgré la variété de ces thèmes, le film réussit à les traiter finement et à les imbriquer pour aboutir à un scénario prenant et intéressant. Le film pose d'emblée le contexte politique ukrainien, et plus particulièrement, la contestation sociale que le gouvernement tente de mater, ce qui pousse Olga, jeune gymnaste visant le championnat européen, à quitter le pays pour la Suisse.
On ressent très rapidement de l'empathie pour la jeune fille, déracinée, un peu perdue dans un pays et des langues qu'elle ne maitrise pas ou peu, et qui a du mal à s'intégrer à son entourage (équipe, nouvelle famille...) qui ne comprend pas les enjeux que traverse son pays d'origine.
Olga est en effet forcée de vivre "à distance" les évènements d'Euromaïdan, révolution pro-européenne et contre le pouvoir en place qui établit une répression particulièrement dure et violente. Cet éloignement géographique s'accompagne d'un éloignement affectif et psychique, comme si elle trahissait sa famille et ses amis restés au pays pour combattre le gouvernement de Viktor Ianoukovytch, comme si elle manquait un évènement important de l'histoire ukrainienne.
Ces évènements sont soulignés dans le film par l'utilisation de nombreuses images d'archives, qui permettent au spectateur de vivre et de ressentir cette révolution en l'observant depuis son fauteuil de cinéma, mais aussi donc de se mettre à la place d'Olga qui ne peut que rester passive devant son téléphone.
A côté de ce que vit la jeune fille, le film aborde aussi la thématique du sport de haut niveau, avec ses difficultés, la compétition omniprésente, de la salle d'entrainement aux championnats, et de l'adversité souvent malsaine qui en découle.
On nous montre d'ailleurs un sport qui se veut apolitique, au-dessus des guerres et conflits, mais qui n'en reste pas moins un enjeu et une scène pour les pays compétiteurs comme pour les athlètes, coachs et entraîneurs.
Côté cinématographique, le film est porté par la très bonne prestation de Nastya Budiashkina, une gymnaste ukrainienne, et non pas une actrice professionnelle, qui parvient à faire passer toute l'émotion ressentie par son personnage ainsi qu'un certain naturel, son français approximatif (même si très compréhensible) n'étant pas feint par exemple. Ses expressions faciales sont travaillées, on ressent son mal-être et sa douleur intérieure, mais aussi son obstination et son courage, simplement à travers l'image.
Les scènes de gymnastique sont d'ailleurs particulièrement bien filmées, montrant bien l'intensité des entraînements, avec de nombreuses coupures donnant de la vigueur à l'image, les sons sourds de réception, de chute rythmant les séquences... L'utilisation d'une doublure pour certaines scènes ne se remarque pas.
Pour le reste, le jeu sur les lumières, grisâtres quand Olga se renferme seule, plus chaudes lorsqu'elle parle à sa famille, ses amis ukrainiens, et la lumière vive et crue des scènes de gymnastiques permettent également de véhiculer les émotions.
Le film est dans un format 4/3 (ou approchant), peut-être pour mieux inclure les scènes d'archives d'Euromaïdan, mais cela donne aussi au film un petit cachet "documentaire" qui renforce l'empathie pour l'héroïne.
Le film est assez court, moins d'une heure trente, ce qui permet au long-métrage de rester rythmé du début à la fin, sans temps mort, forçant le spectateur à rester concentré sur la vie d'Olga, sans que l'esprit ne puisse divaguer...
Avec son scénario particulièrement original, ses choix cinématographiques réussis, et son interprétation de qualité, Olga a de quoi marquer les esprits, dès lors que le spectateur parvient à s'attacher à l'héroïne du film (ce qui a totalement été notre cas).