Emiliano est le fils d’une activiste écologiste, disparue et probablement tuée par la police trois ans plus tôt. La quête de sa mère le mène dans la luxueuse résidence secondaire d’une famille de stars – Carmen est chanteuse, Rigo est artiste, Monica, la fille de Carmen, est influenceuse – où Emiliano se fait embaucher comme homme à tout faire.
Le cinéma mexicain est fascinant Trois figures tutélaires le dominent aujourd’hui, Alfonso Cuarón, Guillermo del Toro et Alejandro Iñárritu, au risque d’écraser les autres. Parmi elles, Carlos Reygadas, Michel Franco (je ne me suis jamais remis de la dernière scène de "Después de Lucía") et Amat Escalante.
Je n’ai pas vu ses deux précédents films, interdits aux moins de seize ans, "La Région sauvage" (2016) et "Heli" (2013). Celui-ci n’est pas piqué des hannetons. Il est pourtant autorisé à tous les publics, quand bien même on y voit lors d’une scène d’amour bucolique, Emiliano et sa fiancée se donner tendrement du plaisir l’un à l’autre, avant de disserter sur le goût du sperme et celui du sirop d’agave. Mais au-delà de cette scène sans conséquence, c’est tout le film qui baigne dans une ambiance troublante.
D’une grande densité, il mêle plusieurs sujets : l’écologie, le capitalisme prédateur, le millénarisme évangéliste, les conflits de classe dans un pays, le Mexique, dont on sait que les inégalités y sont parmi les plus criantes au monde, le star-system et l’influence des réseaux sociaux… On croit un instant que le propos va sombrer dans la caricature, noircissant les traits de ces stars dégénérées, ivres de leur supériorité. Mais "Lost in the Night" est moins caricatural et plus subtil. Son scénario, au rythme déconcertant, fait de brusques accélérations et de brutaux ralentissements, est sacrément riche. La fin n’en finit pas. Mais son dernier plan, avec la sublime Ester Expósito – qui, à l’avant première, était aussi bombissime sur la scène qu’à l’écran – valait l’attente.