Ah mais quelle bonne intro ! Une bonne musique épurée qui instaure tout de suite une atmosphère prenante ; un enchainement de plans qui sait poser rapidement les personnages et l’intrigue ; et le tout sans parole et avec style… Ah ça ! Sur ses premières minutes, il fleurait déjà bon le polar underground, un peu trash, mais bien maitrisé formellement ce « Hyena »… Mais bon, après ce genre de phrases il a toujours un « mais » qui pointe le bout de son nez. Or, là, oui effectivement, j’ai quand même ma petite cohorte de « mais » à vous faire partager, même si ça reste de tous petits « mais ». D’abord, puisqu’on parlait de style et de maitrise, Gerard Johnson a fait le choix d’une caméra à l’épaule assez gigoteuse, qui suit les personnages dans ses déplacements à la mode de « The Wreathler », tout ça dans le but de coller à une certaine forme de cinéma réaliste. Why not… C’est un style, mais moi, je ne suis pas fan. Ça fait souvent une image crade, associée parfois à un son lui aussi assez sale, très « prise directe » sans filtre... C’est certes voulu et cohérent au regard des personnages et de l’univers, mais décidément non, ce n’est vraiment pas ma tasse de thé. Gigoter pour gigoter, alors que les personnages sont statiques, moi ça distraie mon attention en permanence, ça me gêne clairement dans mon immersion. Pareil pour le son : passer d’une scène très stylisée uniquement accompagnée de musique à un univers sonore totalement cru ; moi je dis : « ouille ! » Ensuite, il y a cette histoire, le ton qu’elle prend, et la manière dont elle évolue… Et là, le petit souci, c’est que je trouve que ce « Hyena » souffre un petit peu de son modèle en lui collant trop. Parce que oui, non seulement c’était déjà pour moi une évidence dès cette introduction qui récupérait beaucoup d’idées à « Drive », mais avec le reste c’était encore plus flagrant : Gerard Johnson a posé le cinéma de Nicolas Winding Refn comme modèle absolu. Or, que ce soit aussi bien par cette ambiance ; cette escalade progressive dans le sordide ;
mais aussi cette manière dont le piège se referme sur son héros
: tout renvoie à « Pusher ». Or, le problème, c’est que « Pusher » était quand même beaucoup plus vif (même si ce « Hyena » se défend) ; un brin moins gratuit dans sa violence visuelle ; mais surtout, beaucoup plus oppressif dans sa manière de piéger le personnage (
c’est con, mais dans « Pusher » le mec est pris dans l’engrenage dès le début et ne peut pas s’en sortir, ce qui fait qu’il est plus facile, selon moi, de s’identifier à sa situation. Dans « Hyena », Logan peut clairement limiter la casse à tout instant : il suffit qu’il arrête d’être aussi gourmand et de vouloir jouer sur tous les tableaux. Alors OK, c’est crédible par rapport à la logique du personnage, mais du coup il est plus difficile d’être en accord avec ses décisions et d’être en empathie avec lui
). Au final, après avoir fait une telle liste de « mais », vous allez peut-être vous dire qu'il n'y a finalement pas grand-chose sur lesquelles j'ai pris du plaisir, eh bien détrompez-vous. Certes, la forme ne m’a pas totalement emballé ; l’intrigue non plus (
et puis bon, cette fin qui n'en est pas vraiment une, j’ai quand-même trouvé ça un peu facile
), mais malgré tout, c’est quand même là un film très nerveux, sans réelle concession, avec des personnages bien taillés comme il faut, et surtout fait avec une vraie sincérité. Certes, ce Gerard Johnson n’est pas tout jeune non plus, mais je pense qu’il peut encore nous surprendre à l’avenir s’il mûri son cinéma. En attendant, « Hyena » est déjà bon à prendre. Il mérite son détour...