Ari Aster a eu l'idée de Beau Is Afraid avant même de réaliser ses deux premiers longs-métrages, Hérédité et Midsommar. Alors qu'il travaillait sur ses courts, il a dû quitter en vingt-quatre heures l’endroit où il habitait. C’est ce qui a inspiré ce portrait d’un homme rongé par l’angoisse et ayant peur de tout.
Ce premier jet du scénario était nourri par ses lectures d'alors, principalement Franz Kafka, Carl Gustav Jung, Jorge Luis Borges, mais dans une version plus dépouillée, plus acide et plus drôle. Quant au personnage de la mère, Mona, Ari Aster s’est emparé de l’archétype freudien des mères qu’on tient pour responsables de tous les maux et angoisses des enfants, pour en faire un personnage omniprésent, mythique et culpabilisant. Est-elle vraiment responsable de tout ce qui a déraillé dans la vie de son fils ?
Ari Aster a à l'époque mis de côté ce scénario pour réaliser ses deux premiers films : "Ce premier jet était sombre, cartoonesque, avec moins de pathos. Je le « pitchais » comme une odyssée freudienne comique". Quand il y est revenu, il a trouvé le script trop épisodique, conçu comme une succession de sketchs, et l'a réécrit pour le nourrir de ses expériences. Avec ce film, il souhaite mettre les spectateurs dans la tête de Beau et leur faire partager ses émotions.
Devenu l'un des nouveaux maîtres de l'horreur avec Hérédité et Midsommar, Ari Aster estime que Beau Is Afraid est le film qui lui ressemble le plus : "Il contient ma personnalité et ma vision de l’humour". Alors que les deux films précédents se déroulaient dans des univers confinés, celui-ci s’aventure dans le monde. De plus, Florence Pugh dans Midsommar et Toni Collette dans Hérédité tentaient chacune d’échapper à d’atroces traumas familiaux qui les privaient de leur mère. Au contraire, le personnage de Beau a une mère beaucoup trop présente, qui l'étouffe.
Le film est construit en quatre parties plus deux séquences, l’une est un flash-back sur une croisière qui cimentera la dynamique de la relation entre Beau et sa mère, et l’autre est un dénouement pour le moins énigmatique. Ari Aster explique : "Je voulais m’éloigner d’une structure traditionnelle. Je voulais éviter les trois actes et me rapprocher du rythme du roman, en adoptant une structure moins conventionnelle et davantage contre-intuitive".
Ari Aster n'osait pas imaginer avoir Joaquin Phoenix dans le rôle de Beau, d'autant plus que le comédien venait d'obtenir l'Oscar du meilleur acteur pour Joker. "J’ai toujours pensé qu’il était le plus grand acteur du monder. Maintenant, je sais qu’il est encore plus fort que ça. C’est la plus belle expérience que j’ai connu avec un acteur". Ce dernier s'est complètement investi dans le rôle, réalisant lui-même l'essentiel de ses cascades. Le cinéaste, qui a l’habitude de mettre en place les scènes d’avance, de prévoir l’emplacement des acteurs et des caméras, a délaissé cette manière de faire pour rester ouvert aux propositions de Phoenix.
Le film a été entièrement tourné à Montréal, dans des décors urbains, banlieusards et ruraux. Pour la première partie, la chef-décoratrice Fiona Crombie a immobilisé un quartier entier. Ari Aster a passé des heures à imaginer le nom des magasins, des produits et des publicités : "Je les ai rendu fous. Chaque fois que l’équipe déco pensait avoir fini, j’arrivais avec encore des couvertures de livres, encore des affiches, encore des publicités. C’est ce que j’adore quand je fais un film. Inventer ces univers glauques et comiques". Les intérieurs du début, tels que le bureau du psy, le hall, les couloirs et l’appartement de Beau ont été construits en studio.
Beau Is Afraid devait s'intituler à l'origine "Disappointment Blvd." et était décrit par Ari Aster comme "une comédie cauchemardesque de 4h".
Le 1er avril 2023, Ari Aster et la société de production A24 ont fait une jolie surprise au public du cinéma Alamo Drafthouse de New York. Alors que les spectateurs pensaient venir assister à une projection du director's cut de Midsommar, ils ont pu découvrir en avant-première Beau Is Afraid, environ un mois avant sa sortie réelle.
Beau Is Afraid n'est pas sans rappeler un court-métrage d'Ari Aster réalisé en 2011, s'intitulant Beau et mettant en scène un homme névrosé qui doit rendre visite à sa mère. L'acteur principal de ce court, Bill Mayo, était d'ailleurs pressenti pour jouer le rôle principal de Beau Is Afraid mais est décédé en 2019. Le comédien était apparu dans un autre court d'Aster, le très dérangeant The Strange Thing About the Johnsons, qui relate un inceste au sein d'une famille afro-américaine.